Prédication du dimanche 26 janvier 2025 au temple de Cortaillod (NE)
Textes bibliques : Psaume 19(18), livre de Néhémie 8, 2-8 et Évangile selon Luc 4, 14-24
Jacques Barbezat à l’orgue.
Ayant lu le passage du jour, Jésus referma le livre, le rendit au servant, s’assit. Tous dans la synagogue avaient les yeux fixés sur lui.
Luc 4, 20
[Silence…]
Toute ressemblance…
Toute ressemblance avec des situations ou des personnages existants ou ayant existé ne serait que pure coïncidence… Ou presque.
Ne voyez-vous pas, chers Amis, quelques similitudes entre le prêtre Esdras devant l’assemblée, Jésus à la synagogue et nous aujourd’hui, ici en ce temple de Cortaillod ?
Il y en a plusieurs, évidemment : le fait d’être réunis d’abord en un seul lieu autour d’un « célébrant » et dans l’attente d’une parole. Et surtout, ce qu’il y a au centre, c’est la parole justement. La parole de Dieu, contenue, relatée dans le rouleau pour nos prédécesseurs, dans la bible pour nous aujourd’hui. Une parole. Et bien plus qu’une parole, son interprétation. C’est-à-dire cette volonté de lui donner du sens pour ceux qui écoutent, afin que cette parole lue et proclamée ne reste pas des mots qui pourraient s’évaporer, non ! Mais au contraire qu’ils prennent corps, qu’ils s’enracinent au plus profond de notre être et qu’ils deviennent inspirants pour la vie de chacun.
Plus c’est court, mieux c’est
Au fait, la lecture de l’Évangile que nous venons d’écouter s’est arrêtée au moment le plus important, celui où Jésus allait prononcer son propre commentaire, inspiré par l’Esprit Saint. Alors, écoutons-le :
« Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre ».
Voilà. C’est court et bref ! Un peu trop sans doute. Mais n’y a-t-il une invitation, à nous qui commentons la Parole lors de nos cultes, à nous laisser inspirer par cette concision. Aller à l’essentiel dans nos prédications.
Alors oui, la lecture et le commentaire de Jésus, appellent quelques précisions. Jésus, adulte, est retourné là où il a grandi, à Nazareth. Là-bas, on le connaît, c’est le fils de Joseph le charpentier et de Marie. Et la première réaction de ses auditeurs, c’est l’admiration. Si on tend l’oreille, on entend les chuchotements, les murmures : D’où lui viennent ce savoir et cette autorité ? Nous le savons, nous qui lisons, puisque Luc précise que c’est par l’Esprit que Jésus est là.
Une parole pour aujourd’hui
Nous sommes juste après son baptême, rappelons-le. Jésus est au début de sa vie publique. Ici, dans son aujourd’hui à la synagogue, Jésus annonce une bonne nouvelle, un Évangile, qui pourrait se résumer en un mot : LIBERTÉ ! Celle des captifs, celle des malades, celle des exclus, celle de toutes et tous. En le suivant sur les chemins, aux côtés de ses disciples, nous verront combien Jésus incarnera les paroles du prophète Esaïe.
Et ce qu’il annonce, ce n’est pas une vague promesse pour demain, plus tard, pour un avenir lointain. Non ! L’annonce de la liberté, c’est pour aujourd’hui. En Jésus, en son Envoyé, en son Fils, Dieu vient apporter la libération aux prisonniers de toutes sortes, pas seulement ceux des geôles.
Jésus n’aura de cesse d’annoncer avec autorité l’aujourd’hui de la libération offerte par la grâce de Dieu. Dans la rencontre, avec son Fils, Dieu rend à chacune et chacun sa dignité de femme et d’homme libre, d’enfant de Dieu, au-delà de toute considération légaliste.
Dans son bref commentaire, Jésus accentue l’aujourd’hui de la libération et de la liberté des enfants de Dieu retrouvée et cela sans condition, puisque c’est le choix de Dieu lui-même que de faire grâce. Et cette promesse nous concerne aussi.
Tout comme les auditeurs du premier siècle, cette parole résonne à nos oreilles : la promesse d’une libération se réalise aujourd’hui, mais pour qui ? Une première compréhension pourrait nous faire tourner le regard vers celles et ceux qui vivent aux marges de notre société, prisonniers des préjugés de la société, ou prisonniers tout courts.
Pour nous aussi aujourd’hui
Mais, plus encore et d’abord je crois, cette parole pourrait nous concerner nous d’abord. Ne ressentons-nous pas en nous-mêmes ce sentiment d’être prisonniers de quelque chose : de peurs, de blocages, de paralysies, de manques… Et voilà qu’aujourd’hui la parole de Dieu vient briser ces chaînes, nous remettant debout et en marche à la suite du Christ qui a tout donné, jusqu’à sa vie, pour que nous soyons libres de toutes peurs, portés dans l’amour infini de Dieu pour chacun. Nous n’avons donc plus rien à craindre !
Et nous, aujourd’hui ? Aurons-nous à notre tour l’audace d’une parole libératrice pour nos sœurs et nos frères qui sont prisonniers de quelque chose ? Aurons-nous ce courage d’oser une parole forte qui relève, qui donne confiance, qui promet un présent et un avenir à nos prochains qui n’en voient plus ou qui craignent pour leur vie ? Aurons-nous l’audace de Mariann Budde, évêque de Washington qui a publiquement sermonné et appelé le nouveau président des États-Unis à la miséricorde envers les minorités ? Je le crois, si nous nous mettons à l’écoute de l’Esprit-Saint.
Laissons-nous guider
Si, tout comme Jésus, nous nous laissons guider par cet Esprit qui pourrait bien nous conduire là où nous sommes attendus, peut-être sans que nous le sachions nous-mêmes, alors nous pourrions être des porte-paroles de la grâce de Dieu.
Et de telles paroles n’ont pas besoin d’une pléthore de mots convenus. Quelques mots forts, qui ont du poids, qui affirment ; quelques mots inspirés feront l’affaire. Ensuite, laissons la main et la parole à Dieu pour faire que ce ne soient pas des paroles en l’air.
J’en reste là pour aujourd’hui. Je n’ai pas été aussi concis que Jésus, excusez-moi, mais je vous laisse cette parole à vous qui êtes là maintenant : « Aujourd’hui, s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre » (Luc 4,21).
Amen.