L’espérance : un hymne à la vie

Prédication enregistrée au temple de Cortaillod (NE) le dimanche 29 décembre 2024, dernier dimanche de l’année.

Textes bibliques : Lettres aux Hébreux 11, 1-3 et Évangile selon Luc 8, 4-10

Jean-Philippe Schenk à l’orgue

Chers Amis,

Il m’est difficile de vous adresser des vœux de bonne et heureuse année en ces temps où des conflits armés s’enlisent et larvent notre monde, et pas si loin de chez nous, où la morosité ambiante prend le pas sur l’enthousiasme, où un virus fait encore parler de lui et tout cela sur fond de réchauffement climatique, de pauvreté, d’isolement, et d’appels répétés à la sobriété.

N’est-ce pas naïf de croire que cette année qui est à nos portes sera bonne et heureuse, meilleure que celle qui se termine ? Les échos du monde nous inciteraient plutôt à la résignation, au désespoir, voire à la dépression profonde. Et pourtant !

Une parole pour tenir bon

Face aux cris et aux images du monde, une parole résonne en moi et m’accompagne, se faisant de plus en plus insistante. Je vous la partage, avec l’espoir qu’elle puisse vous réconforter et vous inspirer à votre tour. Elle vient de la lettre aux Hébreux :

« La foi est une manière de posséder déjà ce que l’on espère, un moyen de connaître des réalités que l’on ne voit pas. »
(Hébreux 11, 1).

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On fait quoi, maintenant ?

Prédication du culte du 3e dimanche du temps de l’Avent, 15 décembre 2024, au temple de Corcelles (NE). Organiste du jour : Maryclaude Huguenin

Textes bibliques : Lettre aux Galates 3, 21-26 et Évangile selon Luc 3, 10-18.

Image de couverture : Crèche de Noël confectionnée par V. Widmer et une équipe de la paroisse.

Un enregistrement vidéo est disponible pendant quelques semaines sur la page Facebook de la paroisse de la Côte : Paroisse de la Côte – EREN | Facebook

Chers Amis,

Nous avons tous expérimenté cette situation un brin gênante, que ce soit dans une salle d’attente, à l’église ou dans la file du cinéma. Nous sommes accompagnés d’enfants – parfois un seul suffit – et nous attendons que le temps passe, que l’orgue se mette à jouer ou qu’arrive notre tour. On a bien prévu des feuilles et des crayons, un petit jeu silencieux, le défi de compter les punaises sur le mur, les poissons dans le filet de l’image du vitrail, les voitures rouges, rien n’y fait, arrive ce moment tant redouté où le bambin s’adresse à nous d’un air plaintif et à grands cris : « On fait quoi, maintenant, c’est trop long ! » « Eh bien, mon chéri, on attend… Et sagement s’il te plaît. » Bon, ça marche moyennement… Mais ça dit bien qu’il y a des attentes qui durent et que la perception du temps n’est pas la même selon la taille et l’âge de celui qui attend.

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Donner par amour, l’histoire d’une veuve

Textes de la narration et de la prédication du culte du dimanche 17 novembre 2024 au temple de St-Aubin.

Textes bibliques : Premier livre des Rois 17, 10-16 et Évangile de Marc 12, 38-44.

Ce dernier texte a inspiré Myriam Leresche pour le tableau en couverture.

Jean-Philippe Schenk à l’orgue

Chères Amies et Chers Amis,

J’ai fait le choix, audacieux sans doute, de me mettre dans le rôle de cette veuve du Temple de Jérusalem. Je prends le risque de parler à sa place, de visiter les pensées qui auraient pu être les siennes. C’est subjectif, évidemment. Et vous avez le droit de penser autrement. Ensuite, je vous partagerai une courte réflexion.
Alors, je vous invite à la rejoindre, cette veuve, dans l’agitation de ce jour-là au Temple de Jérusalem. Vous la voyez ? Vous l’entendez ? Tendez l’oreille…

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Pour une Parole vivante

Prédication du dimanche 30 juin 2024 au temple de St-Aubin (NE)

Chers Amis,

Peut-être que certains d’entre vous ont prévu une croisière cet été. Si c’est le cas, je vous souhaite de pas avoir à essuyer pareille tempête à celle que les disciples ont ont eu à affronter ce jour-là sur le lac de Tibériade ou de Génésareth – car, c’est là que se passe cet épisode. Une tempête. Des flots qui emplissent la barque qui menace de couler… Peur ! Mort !

Ce jour-là, le soir venu, Jésus leur dit: «Passons sur l’autre rive.» Après avoir renvoyé la foule, ils l’emmenèrent dans la barque où il se trouvait; il y avait aussi d’autres barques avec lui. Un vent violent s’éleva et les vagues se jetaient sur la barque, au point qu’elle se remplissait déjà. Et lui, il dormait à l’arrière sur le coussin. Ils le réveillèrent et lui dirent: «Maître, cela ne te fait rien que nous soyons en train de mourir?» Il se réveilla, menaça le vent et dit à la mer: «Silence! Tais-toi!» Le vent tomba et il y eut un grand calme. Puis il leur dit: «Pourquoi êtes-vous si craintifs? Comment se fait-il que vous n’ayez pas de foi?» Ils furent saisis d’une grande frayeur et ils se disaient les uns aux autres: «Qui est donc cet homme? Même le vent et la mer lui obéissent!» – Évangile selon Marc 4, 35-41

Toutes proportions gardées, on ne peut s’empêcher de penser aux récentes intempéries qui ont touché de nombreuses régions, dont la Suisse ces derniers jours.

Pourquoi parler de cette tempête ?

Tout comme ici, avec les coups de Joran, il ne devait pas être si rare que des bourrasques agitent la surface du lac de Tibériade sur lequel voguent les disciples ce jour-là. Qu’avait donc de si particulier cette tempête, pour que Matthieu, Marc et Luc la relatent dans leur Évangile ? On le sait bien : la Bible n’est pas un reportage-photo de la vie de Jésus, écrit par des journalistes. Elle se veut être des témoignages d’hommes et de femmes qui ont fait l’expérience du divin. Alors, si cette tempête n’était qu’anecdotique, elle n’aurait sans doute pas retenu à ce point l’attention des auteurs de trois évangiles sur quatre. Elle aurait coulé dans le quotidien insignifiant de l’ordinaire de la vie d’un lac. Je ne doute pas que la barque des disciples ait pu, un jour, se trouver aux prises de vents violents et de flots déchaînés, mais pourquoi donc en faire un tel récit ? Il doit y avoir autre chose… Qui nous interrogerait sur Dieu.

L’interprétation « classique » de ce texte invite les lecteurs à chercher en Jésus-Christ le secours dans les remous de l’existence humaine, à le réveiller quand tout est sur le point de nous submerger. L’épisode serait là pour nous rappeler que Jésus est toujours avec nous, même s’il nous arrive de l’oublier ; qu’il dort dans notre barque-vie et qu’il a une autorité qui va jusqu’à faire taire la menace pour restaurer la sérénité et aller là où on doit aller. Soit. Je partage aussi cette interprétation. Mais, il doit y avoir autre chose…

Changeons un peu de regard

Aujourd’hui, j’aimerais vous inviter à relire cet épisode d’une autre manière et pour cela, je vous invite à une courte escale dans les premiers mots de l’Évangile selon Jean. Souvenez-vous :

Au commencement, la Parole existait déjà. La Parole était avec Dieu et la Parole était Dieu. Elle était au commencement avec Dieu. Tout a été fait par elle et rien de ce qui a été fait n’a été fait sans elle. En elle il y avait la vie, et cette vie était la lumière des êtres humains (…) Et la Parole s’est faite homme, elle a habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité, et nous avons contemplé sa gloire, une gloire comme celle du Fils unique venu du Père. – Évanile selon Jean 1, 1-5 et 14.

Jean nous rappelle que Jésus, la Parole de Dieu, le Verbe, s’est fait chair. Une parole censée guider les pas de nos vies, comme le rappelle ce psaume :

Ta Parole, Seigneur, est une lampe à mes pieds, une lumière sur mon chemin. – Psaume 119, 105

Jésus est cette parole qui guide les pas du croyant. Alors, ne devrait-il pas être à l’avant de la barque, à la proue, le regard fixé sur l’horizon et guidant les disciples pour trouver la route au travers des flots déchaînés ?

Or, ici, Jésus dort à l’arrière de la barque, à la poupe. Insensible à ce qui se passe… Ou oublié, relégué à fond de cale dans l’agitation du moment.

Mais, lorsque la situation devient tellement instable, au point de mettre en péril la frêle embarcation, la vie même de ses amis, ils font alors appel à lui, comme un ultime recours, un ultime secours… La seule bouée qui pourra les sauver en cas de naufrage.

Une Parole vivante, pas figée

Jésus, Parole vivant de Dieu, n’est-ce pas ? Nous voilà interpellés : où est -elle ? Où est Jésus dans notre vie ? Sommeille-t-il quelque part dans le fond de notre bastingage ? Ou est-il devant, nous encourageant à tendre et détendre les voiles, à tenir bon le gouvernail ? Quelle place occupe-t-elle dans notre vie ?

Cette parole, que Dieu a envoyée dans le monde, n’est pas juste à entendre une fois pour toutes pour l’oublier ensuite. Pas plus qu’elle n’est à enfermer dans un livre, fût-il saint, ni dans une église pour le temps d’une célébration. Encore moins à laisser dormir dans nos souvenirs de catéchisme. Si la parole de Dieu guide notre vie, c’est pour lui donner un peu de calme et de paix et ce sera déjà pas si mal. Car, si l’épisode de la tempête apaisée montre d’abord la tempête puis le calme extérieur, je crois que l’agitation et les tempêtes peuvent aussi être tout intérieures.

C’est alors que la parole de Dieu peut ramener un peu de cette sérénité dans nos vies, à un moment où nous perdons pied. Elle peut nous aider à garder le cap contre vents et marées. Comme une profonde respiration, elle peut apaiser – peut-être même faire taire – nos peurs quand c’est le chaos en nous et autour de nous. Mais, elle ne résout pas forcément tout non plus.

Elle permettra de voir la situation un peu différemment, elle pourra susciter le courage de faire le pas suivant, ou encore souffler un peu de confiance et d’espérance. Ce sera déjà pas mal.

Courage !

L’apôtre Paul, à son tour, encourage les croyantes et croyants de Corinthe à garder le cap de l’espérance et de la confiance, malgré les difficultés présentes. A regarder au-delà des mots, au-delà de ce que nous voyons et percevons.

Et comme nous avons le même esprit de foi que celui exprimé dans cette parole de l’Ecriture: J’ai cru, c’est pourquoi j’ai parlé, nous aussi nous croyons, et c’est pour cela que nous parlons. Nous savons en effet que celui qui a ressuscité le Seigneur Jésus nous ressuscitera aussi par Jésus et nous fera paraître avec vous dans sa présence. Oui, tout cela arrive à cause de vous afin que la grâce, en se multipliant, fasse abonder la reconnaissance d’un plus grand nombre, à la gloire de Dieu.

Voilà pourquoi nous ne perdons pas courage. Et même si notre être extérieur se détruit, notre être intérieur se renouvelle de jour en jour. En effet, nos légères difficultés du moment présent produisent pour nous, au-delà de toute mesure, un poids éternel de gloire. Ainsi nous regardons non pas à ce qui est visible, mais à ce qui est invisible, car les réalités visibles sont passagères et les invisibles sont éternelles. – 2e lettre aux Corinthiens 4, 13-18

Et c’est sans doute ainsi que nous pourrons, à notre tour, résister au désespoir et à la résignation, à la peur devant les tempêtes qui agitent le monde actuellement.

Un moment rien que pour la Parole

Cet été, que ce soit sur un bateau de croisière, dans notre jardin, sur une montagne ou ailleurs, si nous prenions un peu de temps pour respirer et réveiller la parole de Dieu au cœur de notre vie. Sans doute que le temps de vacances peut nous le permettre. C’est certainement aussi pour cela qu’il y a le jour du repos, consacré à soigner sa relation à Dieu, à laisser une parole, sa parole, restaurer le calme dans nos vies pour que nous puissions naviguer, ramer, avancer vers son Royaume, dans la confiance et la paix, malgré les circonstances.

source de l’image : Pixabay.com

Au delà des mots, être vrai !

Prédication du Dimanche des réfugiés au temple de Corcelles (NE) le dimanche 16 juin 2024.

Enregistrement audio a posteriori.

Il y a quelque temps, le président du Conseil synodal de l’EREN, Yves Bourquin, a signé une chronique dans le journal Réformés avec ce titre « Prendre la Bible à la lettre ou la prendre au sérieux ! » J’ai aimé ce titre et j’ai apprécié ce qu’il en disait. Car, oui, nous avons le choix de lire la Bible au pied de la lettre, au mot près, ou avec un regard critique, la prenant au sérieux et ce n’est pas tout à fait pareil. Ce qu’elle dit a du sens et donne du sens à nos vies, à nos engagements et à notre foi.

Deux manières (au moins) de lire la Bible

La Bible est un magnifique panorama de témoignages d’hommes et de femmes en lien avec Dieu en des temps et des circonstances particulières et diverses. Ce qu’ils et elles disent a donc valeur de vérités, pour autant qu’on garde en mémoire le pourquoi de leurs propos. Cette précaution prise, on pourra alors extrapoler et se questionner en quoi ces témoignages – fort anciens – peuvent être encore pertinents pour nous aujourd’hui. Il ne s’agit pas de faire du « copier-coller » sans réfléchir, mais de faire preuve de sérieux dans la lecture de la Bible et son interprétation.

Une autre manière d’approcher les Écritures est de les lire au pied de la lettre, au plus près des mots. Et l’histoire humaine a été parsemée de ces interprétations littérales. Aujourd’hui encore, il n’est pas rare qu’« on » tire un verset, comme un magicien un lapin de son chapeau et qu’on lui fasse dire surtout ce qu’on veut, sous le prétexte que c’est dans la Bible. Donc, parole d’Évangile !

Attention, ce n’est pas très sérieux et à ce petit jeu, on peut vite se brûler les doigts.

Accepter un texte jusqu’à ses mots les plus durs

C’est à dessein que j’ai choisi, entre les deux textes proposés ce dimanche par l’EPER celui du psaume 137. J’aurais pu, j’aurais dû peut-être, me réfugier dans ma zone de confort et m’attarder sur le texte des disciples d’Emmaüs (l’autre référence proposée).

Sur les bords des fleuves de Babylone, nous étions assis et nous pleurions en nous souvenant de Sion.
Nous avions suspendu nos harpes aux saules du voisinage.
Là, ceux qui nous avaient déportés nous demandaient des chants, nos oppresseurs nous demandaient de la joie: «Chantez-nous quelques-uns des chants de Sion!»
Comment chanterions-nous les chants de l’Eternel sur une terre étrangère? Si je t’oublie, Jérusalem, que ma main droite m’oublie!
Que ma langue reste collée à mon palais, si je ne me souviens plus de toi, si je ne place pas Jérusalem au-dessus de toutes mes joies!
Eternel, souviens-toi des Edomites! Le jour de la prise de Jérusalem, ils disaient: «Rasez-la, rasez-la jusqu’aux fondations!» Toi, ville de Babylone, tu seras dévastée.
Heureux celui qui te rendra le mal que tu nous as fait!
Heureux celui qui prendra tes enfants pour les écraser contre un rocher!
Psaume 137

Mais non ! J’aurais pu, j’aurais dû peut-être, comme souvent, ôter de la lecture le dernier verset du psaume 137. Parce que, comment la Bible, la parole de Dieu, peut-elle inciter à écraser des enfants contre un rocher ? Ce doit être une coquille de copistes… Ce n’est pas sérieux !

Si j’avais fait cela, si j’avais « édulcoré » ce psaume, je n’aurais pas été fidèle au texte. J’aurais sans doute fait dire à la Bible ce que j’avais envie d’entendre, ce que je voulais qu’elle me dise. Je l’aurais sans doute trahie. Alors, j’ai assumé ce texte, je l’ai pris au sérieux jusqu’à son dernier mot.

Les psaumes de l’existence humaine

Il vaut la peine de se souvenir que le livre des Psaumes est un recueil de prières, sous formes de chants dont nous avons perdu la mélodie. Nous en avons d’autres arrangements dans les gospels ou nos recueils de cantiques. Ce sont des prières donc ; des mots, certes, mais surtout qui traduisent des émotions ressenties par des femmes et des hommes en des circonstances particulières : des moments joyeux, alors il nous faut louer Dieu. Des peurs, des angoisses, recherchons en Dieu un abri, une protection. La conscience de la grandeur du ciel et de la petitesse de l’humain, rendons gloire à Dieu pour la beauté de sa création. Le recueil des psaumes est un magnifique panorama de l’âme humaine élevée vers Dieu. Un peu un condensé de toute la Bible.

Et parmi les circonstances de l’histoire et de la vie, il y en a qui conduisent au désespoir. Souvenons-nous : le peuple de Dieu a été capturé et emmené en exil à Babylone, loin de sa terre promise. Et là, plus l’envie de chanter ni de faire vibrer les harpes ni résonner les instruments. Plus l’envie de danser ni de rire. On se souvient d’où l’on vient. On voit où l’on est. On subit le mépris et l’arrogance des plus forts ! Comment alors célébrer la vie sur la terre de ceux qui nous ont arrachés à nos racines et nous ont contraints à vivre dans cet ailleurs ? Voilà ce qui devait habiter les pensées des exilés à Babylone. Voilà ce qui doit aussi habiter les pensées de tous ceux qui ont dû fuir à leur tour leurs terres d’enfance vers un ailleurs qu’ils ne voulaient pas.

Dans ce désespoir, dans cette nostalgie, surgissent alors des émotions : tristesse, bien sûr, colère sûrement. La colère fait naître la haine : on en veut à ceux qui nous ont arrachés à notre terre. On aimerait qu’ils connaissent le même sort, en pire.

On en vient à la vengeance : on se réjouirait de celui qui rasera à son tour Babylone l’envahisseur, qui écraserait ses enfants contre les rochers ! Des mots qui traduisent des émotions !

Quel Dieu prie-t-on au fait ?

Aujourd’hui, ce texte nous est difficilement audible. Il grince à nos oreilles, parce qu’il vient bousculer notre image d’un « bon » Dieu, aimant, qui offre sa grâce à tous et à chacun sans exception qui appelle jusqu’à aimer ses ennemis. Oui, certes. Mais, ce Dieu-là est aussi celui que l’on prie, à qui l’on se confie et à qui on confie ses émotions. Et comment nous confier à lui, lui Dieu, sans être vrais, authentiques, avec nos blessures, nos colères, nos regrets, nos rages ?

Combien de pourquoi : « Pourquoi Dieu a-t-il permis les massacres d’innocents ? » Cette question est légitime.  Nous n’avons souvent pas de réponses convaincantes. C’est alors dans cette impuissance à justifier quoi que ce soit que nos émotions peuvent monter vers Dieu dans nos prières.

Dieu est cette oreille ultime, quand il n’y a plus personne pour écouter, quand il n’y a plus rien à espérer. Dieu ne rejettera pas celui ou celle qui se tourne vers lui en toute sincérité. Être vrai et sincère, c’est se présenter devant Dieu sans artifice, conscients que nous avons besoin de son écoute, de sa grâce, de son pardon, de son amour. Peut-être encore plus quand nous vivons des situations traumatisantes.

L’accueil au centre

Comme en écho, il y a l’accueil de Jésus pour les petits enfants, ceux que les disciples essayaient d’éloigner.

Des gens lui amenaient même de tout petits enfants afin qu’il les touche, mais les disciples, en voyant cela, leur firent des reproches. Jésus appela les enfants et dit: «Laissez les petits enfants venir à moi et ne les en empêchez pas, car le royaume de Dieu est pour ceux qui leur ressemblent. Je vous le dis en vérité, celui qui n’accueille pas le royaume de Dieu comme un petit enfant n’y entrera pas.»
Évangile selon Luc 18, 15-17

En ce temps-là, ils n’avaient pas grande valeur, considérés plutôt comme des bouches à nourrir et des fardeaux plutôt que des aimés de Dieu. Jésus les reprend, les disciples : « Laissez venir à moi ces petits enfants ». Et nous aimerions que les enfants trouvent cette oreille attentive et cette confiance auprès d’un parent, d’un ami.

En ce troisième dimanche de juin, nous dédions cette journée à celles et ceux que nous appelons des réfugiés. Des femmes, des hommes, des familles qui ont été contraints de fuir leur pays en guerre vers d’autres horizons, espérant y trouver une autre humanité. Elles et ils ont besoin d’être accueillis, reconnus, soutenus, défendus. Nous dédions aussi cette journée aux personnes qui les accueillent, les soutiennent et les défendent.

Dans ces relations qui se construisent peu à peu, il y a toutes sortes d’émotions du rire aux larmes, de la reconnaissance à la colère, de la défiance à la confiance. Peut-on seulement imaginer tout le chemin émotionnel traversé par celles et ceux qui ont dû abandonner leur famille, leur pays, leur quotidien.

C’est sérieux !

Sur chacune de ces personnes accueillies ou accueillantes, Dieu veille et pose une main bénissante. Il soutient les gestes de fraternité et d’humanité, il accueille toutes – vraiment toutes – les prières et souffle la paix dans les cœurs. Ainsi, avec nous, il fait advenir son Royaume aujourd’hui déjà. Car, Dieu nous prend au sérieux. Ce ne sont peut-être que des mots dits comme cela devant vous. Et c’est sans doute facile de le croire pour nous qui sommes ici, loin des champs de bataille.

Mais quand même, l’amour et le souci que Dieu témoigne à chacune et chacun, ça, nous pouvons le prendre au sérieux. Amen.