La pasteure Sandrine Landeau de l’EPG répond à un internaute sur le site jecherchedieu.ch au sujet du « devoir du culte ». Sa réponse dont je relaie quelques éléments m’inspire des réflexions personnelles tirées de ma pratique et de mes expériences que je partage ici.
Faut-il ? Doit-on ?
La question pose l’obligation d’aller, d’assister, de participer au culte.
Dans le christianisme, et particulièrement dans le christianisme d’expression réformée, il n’y a pas d’obligation de venir au culte, ni d’ailleurs de prier comme ceci ou comme cela, à telle heure ou à telle autre. Ce n’est pas que le culte n’est pas important, c’est juste que Dieu ne va pas nous en vouloir ni nous punir si nous n’y allons pas.
J’ai rencontré des personnes, tout au long de mes divers engagements et ministères, qui s’excusaient de ne pas pouvoir, de ne pas avoir pu, d’avoir oublié de venir au culte. Comme si elles allaient être punies d’avoir manqué ce moment. J’ai toujours répondu que le culte était une invitation, pas une obligation. On va au culte pour de nombreuses bonnes raisons, mais si on y va parce qu’on se sent obligé, ou parce qu’on nous oblige à y aller, alors c’est une mauvaise raison.
J’ai été agacé par l’empressement de certains responsables d’Église à reprendre les célébrations, à demander (instamment) au Conseil fédéral de permettre les rassemblements religieux à fin mai 2020, alors que l’épidémie de la Covid laissait encore beaucoup de questions sans réponse.
Dieu n’est pas un Dieu qui oblige, mais un Dieu qui propose, qui dialogue. Quand Jésus résume la Loi de Dieu, c’est l’amour qui reste, pas le culte.
Voilà sans doute ce qu’il y a retenir : l’amour et comme le rappelle l’apôtre Paul : l’amour pardonne tout, aussi bien les blessures profondes que les manquements au culte. On est bien d’accord qu’on n’aimera pas plus celui ou celle qui est habitué.e au culte que celui ou celle qui n’y va jamais.
Le culte, pour qui ?
Ensuite, le culte n’est pas réservé aux fidèles, à celles et ceux qui fréquentent régulièrement le culte. Il est ouvert à tous et toutes : les régulier.ère.s comme les moins régulier.ère.s, les hommes comme les femmes, les noir.e.s comme les blanc.he.s, les adultes comme les enfants, les passionné.e.s comme les simples curieux.ses qui passaient là et cherchent à s’abriter de la pluie ou du soleil, les intéressé.e.s comme ceux qui viennent pour accompagner leur grand-mère et lui faire plaisir. Tout le monde est bienvenu (…)
Nous touchons là au coeur de la question : à qui s’adresse le culte ? Qui vient au culte ?
- Les fidèles, les réguliers : donc ceux qui sont là tous les dimanches ? Alors avouons que s’ils sont fidèles, ils ne pas aussi nombreux qu’on pourrait le souhaiter. Et les statistiques nous montrent qu’ils deviennent de moins en moins nombreux;
- Les paroissiens ? Alors, ils ne sont pas tous là, et on est loin du compte, même lors de célébrations particulières. Rassembler une centaine de participants, c’est très bien, mais si la paroisse compte 1’000 membres inscrits, ce n’est que 10%.
- Les occasionnels ? Alors, il est important de les accueillir avec chaleur, leur souhaitant une vraie bienvenue, plutôt qu’un regard réprobateur qui dit : « Ça fait longtemps qu’on ne vous a pas vu ! »
- Les gens de passage, à la recherche d’un coin de parapluie ou de paradis. Alors, donnons-leur une place, celle qui leur revient de plein droit. C’est à eux, à eux d’abord, que ce moment-culte est destiné.
- Tous ceux qui sont là par obligation : pour faire plaisir à leur grand-mère, parce que leur éducation leur impose de respecter la tradition, parce qu’il faut faire « oeuvre de pénitence ». Le culte s’adresse à eux aussi pour leur dire que rien n’est imposé, que tout est proposé.
- Les amateurs de musique qui viennent surtout pour la musique. Bienvenue à eux et pardon d’être trop long entre deux pièces musicales.
- Tous les autres qui sont là et dont on ne connaîtra jamais la motivation. Vous êtes là ! N’est-ce pas merveilleux ! Merci.
Une question de vocabulaire
Tout le monde est bienvenu, et le culte devrait s’adresser à tous et toutes, ce qui suppose un gros travail dans nos formulations, nos façons d’être. Nous, pasteur.e.s et membres d’Eglises, ne sommes pas toujours au top, mais on y travaille !
Pour s’adresser au plus grand nombre, encore faut-il être audible et compréhensible. Le travail de formulation dont parle Sandrine Landeau est essentiel. Les jeunes que j’ai côtoyés ont souvent dit à propos d’un culte auquel ils avaient assisté (par obligation) : c’était long… On n’a rien compris… Et l’orgue, c’est chiant !
La formulation va au-delà des seuls mots, du seul vocabulaire. Je suis le premier à affirmer qu’il nous faut revoir, nous célébrants, nos codes. Mais, je n’ai pas encore osé, trouvé, la forme qui parlera au plus grand nombre.
La diversité des motivations et des attentes rend l’exercice encore plus difficile : comment concilier l’attente d’une paroissienne régulière qui veut une prédication profonde et inspirée avec le besoin de ce jeune homme qui vient à un culte pour la (presque) première fois sans en connaître tous les codes ?
Car, avouons-le, nos cultes obéissent à des codes, des règles, des impératifs qui ne parlent plus à la majorité de nos contemporains, paroissiens compris. Peut-être que les actes ecclésiastiques (baptêmes, mariages et enterrements) permettent une plus grande liberté, quoique, l’exercice n’en est pas moins complexe.
C’est quand ? Maintenant !
Les temples ont rouverts, mais on trouve toujours d’autres formes de cultes pour celles et ceux qui ne peuvent ou ne veulent pas s’y rendre, que ce soit juste pour ce dimanche, ou pour plus que cela.
Le culte est un temps à part dans la semaine. Un moment pour soi, pour les autres et pour Dieu. Et ce temps peut être n’importe quand. Les célébrations dans les institutions ont lieu en semaine. Il y a des cultes le samedi soir ou à d’autres heures que le dimanche matin à 10h00. Là non plus, rien n’est figé, tout est proposé. La radio, la télévion, internet offrent la possibilité de repasser le culte à l’heure qui nous convient, là où on est disponible, à l’écoute, ouvert à ce qui se passera.
En un mot, et pour conclure : le culte est une invitation à se mettre à l’écoute de Dieu et de sa Parole pour mieux se connaître soi-même. Ce temps peut être vécu communautairement et/ou personnellement, dans un temple, à la maison, dans la nature, à côté de sa radio ou devant sa télévision ou ailleurs, là où c’est bon et beau.
Le culte a été fait pour l’homme et non l’homme pour le culte.
Dieu n’impose rien. Il invite. Il ne force pas. Il attend. Il saura nous trouver que nous soyons sagement assis sur un banc d’église ou en chemin quelque part. Il est avec nous. L’essentiel est là. Tout le reste n’est que garniture.