La Crèche aux 5 sens

C’est à un voyage sur 200 mètres carrés que je vous invite, au temple des Éplatures. Ce n’est pas loin, ce n’est pas grand, mais le dépaysement est garanti. En quelques minutes, vous voilà emmenés dans un village de Sicile du XVIIe siècle, grouillant d’activités. Bienvenue à la Crèche aux 5 sens.

La Crèche géante de Noël qui a élu domicile au temple désaffecté (ou désacralisé) des Éplatures, entre Le Locle et La Chaux-de-Fonds, est un havre de paix, une oasis. Et encore plus en ce dimanche de lendemain de Noël gris et pluvieux.

Temple des Éplatures
Qui imaginerait ce qui se cache derrière ces murs ?

C’est à l’initiative de Créa Calame et Maurice Bianchi que nous devons cette magnifique initiative qui les a occupés pendant près d’une année pour le montage d’un décor plus vrai que nature. Cette crèche de Noël se veut aussi itinérante. Il y a deux ans, elle était à l’Abbaye de Saint-Maurice (VS), je l’ai découverte à Yverdon. Elle a aussi investi la cathédrale de Lausanne. À chaque fois, c’est un défi que d’adapter les éléments au lieu choisi. Ici, aux Éplatures, c’est l’espace le plus grand, près de 200 mètres carrés, en comptant aussi l’aménagement de la galerie. C’est aussi le lieu d’ancrage de cette crèche. Aucun détail ne manque. Pas un centimètre n’est perdu. Même les perspectives à travers les portes, entre les maisons et les arbres, donnent à voir quelque chose. Tout ceci, sans compter les centaines de personnages façonnés en terre cuite, plus vrais que nature qui peuplent l’espace. On n’a pas envie de les déranger, tant ils semblent occupés à leur labeur.

>> Lire l’article de ArcInfo du 9 novembre (réservé aux abonnés) : La Chaux-de-Fonds: zoom sur la crèche de Noël géante du temple des Eplatures.

>> Lire aussi l’article de Jura 3 lacs : La Crèche aux cinq sens.

Pour coller à l’actualité

Cette année, la Crèche colle à l’actualité, puisqu’elle n’a pas pu avoir lieu en 2020, pour les raisons que l’on sait, il y a un « Coin COVID » où les gens peuvent se faire tester. Des amis se congratulent de se savoir « négatifs ». Au gré des déambulations, on apprend que le boulanger, lui, est positif…

C’est la troisième édition que je visite et à chaque fois, c’est le plaisir de la découverte. D’ailleurs, les initiateurs le disent, ils repartent de zéro, reprenant des éléments, les agençant différemment, ajoutant des personnages, créant de nouveaux lieux et de nouvelles scènes. Et chaque santon a sa place. D’ailleurs demandez aux concepteurs où se trouve celui-ci ou celle-là, ils vous le diront sans se tromper.

Place du village
Une place de village animée

Une crèche dans le monde

J’aime cette idée que la crèche de Noël s’insère dans un lieu grouillant d’activités diverses, là où les métiers se rencontrent. On y voit, par exemple, des matelassiers, un artisan-boucher, une potière, des vignerons occupés à leurs vignes, un apiculteur, des pêcheurs, et tant d’autres. La crèche passerait presque inaperçue, si on n’y faisait pas attention. À y regarder de plus près, et c’est d’ailleurs un jeu, on découvre les Rois Mages qui évoluent jour après jour vers l’enfant Jésus. Ils y seront le 6 janvier, jour de l’Épiphanie et pas avant. En ce 26 décembre, ils traversaient fièrement la place du marché, sur leurs chameaux, ayant laissé « tout leur avoir et tout leur savoir » – pour reprendre les mots de Créa Calame – à la tente orientale à l’autre bout du décor.

Crèche de la Nativité
La naissance d’un enfant passerait presque inaperçue

Le décor nous fait entrer aussi dans l’intimité des maisons, des entrées et des chambres, toutes savamment éclairées, qui laissent voir ici un arracheur de dents, là un écrivain, ou encore une femme en train de coudre, trois amis qui discutent…

Des villageois discutent en route
On se raconte les dernières nouvelles

Le monde comme décor

À Noël, on ne cesse de rappeler que c’est Dieu qui vient naître dans le monde et dans l’humanité. Là, en entrant dans ce village miniature, bercé par des chants de circonstances, on se met à l’échelle, on déambule à notre tour au milieu des santons. On en entendrait presque l’agitation de l’Osteria, les acclamations des marchands, les rires des enfants devant le théâtre de marionnettes. Toute une vie qui est là et qui n’a pas attendu l’événement de la naissance.

Crèche de Noël: l'osteria
L’agitation de l’Osteria

En passant, et plusieurs fois, devant les maisons, je me demande : ces gens ont-ils conscience de ce qui est en train de se jouer à quelques mètres de là ? Un nouveau-né vient de naître. Qu’est-ce que cela change pour eux pris dans leurs occupations, dans leur agitation ?

Et pour nous, visiteuses et visiteurs ? Qu’est-ce que Noël change ? Comme le relève ma collègue et amie Diane Friedli : Noël, c’est un début. Celui d’une histoire qui n’est pas prête de s’arrêter. Une histoire toujours à relire, à réentendre, car, comme dans la Crèche aux 5 sens, on découvrira toujours des détails, on regardera depuis une autre perspective, on écoutera un autre point de vue.

C’est encore émerveillé du spectacle que je quitte le lieu, non sans avoir vivement remercié ses auteurs de la magie de ce décor. D’ailleurs, on oublie que c’est un décor… Ouvrant la porte du temple, la pluie me rappelle que nous sommes en décembre, qu’il fait gris… Mais, je rentre avec des visages et des histoires et des voix plein la tête.

Infos pratiques : la crèche est visible jusqu’au 16 janvier, tous les jours de 10h à 18h, sur présentation du pass-covid. Entrée libre, dons acceptés avec reconnaissance.

Le temps des fables

Il y a 400 ans naissait Jean de La Fontaine, célèbre pour ses fables qui mettaient en scène un bestiaire varié, allant de la fourmi au bœuf. Pour lui rendre hommage, l’artiste Daniel Richard a mis sur pied une exposition le long du sentier Torby, au cœur des tourbières des Ponts-de-Martel (NE).  Je ne vais pas tout dévoiler, mais j’ai envie de vous donner envie, de prendre du temps, et du bon, pour flâner et méditer au gré des mots d’un autre temps.

Depuis la fin du mois de mai, le sentier Torby dans la tourbière des Ponts-de-Martel accueille une exposition originale : des fables de Jean de La Fontaine, né le 8 juillet 1621. Élégamment mises en scène dans cet écrin de verdure par l’artiste local Daniel Richard, elles m’ont rappelé des leçons de récitations à l’école. Vous savez bien : « La cigale, ayant chanté tout l’été… » Daniel et son épouse Jacqueline se sont associés aux classes de l’école primaire pour donner vie à ces textes d’autrefois. La météo, devenue enfin clémente, nous a permis de parcourir cet sentier que nous connaissons bien pour y dénicher ces fables à regarder, à lire et à admirer.

Daniel est coutumier des expositions dans le marais. Ses vitraux y ont une place de choix. Le 12:45 de la RTS y avait consacré un reportage en 2014 déjà.

 

Des maximes intemporelles et universelles

À relire ces textes, on y découvre un « vieux » français, mais surtout des maximes qui sont toujours d’actualité. On se souvient de « Il ne faut pas avoir les yeux plus gros que le ventre », « Rien ne sert de courir, il faut partir à temps », « Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage » et tant d’autres. Chacune a sa part d’universel, dit quelque chose à nos oreilles contemporaines, nous fait réfléchir à la réalité du temps qui passe. Cette expo est composée de Morbiers en marche, signes du temps qui passe, et le premier nous invite à prendre le temps.

Pendule Prendre le temps
Le temps passe. N’oubliez pas de le prendre

Par ici la visite

Comme je l’ai dit, je ne vais pas tout dire, tout montrer, tout dévoiler. Je voudrais juste vous inviter à venir, à marcher au rythme de vos pas et des textes, à vous laisser inspirer par ce que vous verrez et entendrez. Je suis certain que vous ne verrez pas le temps passer. Je crois d’ailleurs que c’est bien là le but de cette exposition : nous faire voyager entre passé, présent et futur.

Connaissez-vous Dame Belette ?

Pendule Dame Belette

Damoiselle Belette, au corps long et fluet,
Entra dans un grenier par un trou fort étroit :
Elle sortait de maladie.
Là, vivant à discrétion,
La galante fit chère lie,
Mangea, rongea : Dieu sait la vie,
Et le lard qui périt en cette occasion !
La voilà, pour conclusion,
Grasse, mafflue et rebondie.
Au bout de la semaine, ayant dîné son soû,
Elle entend quelque bruit, veut sortir par le trou,
Ne peut plus repasser, et croit s’être méprise
Après avoir fait quelques tours,
« C’est, dit-elle, l’endroit : me voilà bien surprise ;
J’ai passé par ici depuis cinq ou six jours. »
Un Rat, qui la voyait en peine,
Lui dit : « Vous aviez lors la panse un peu moins pleine.
Vous êtes maigre entrée, il faut maigre sortir.
Ce que je vous dis là, l’on le dit à bien d’autres ;
Mais ne confondons point, par trop approfondir,
Leurs affaires avec les vôtres. »

Celle-ci est évidente

Pendule Le corbeau et le renard
Tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute

Maître corbeau, sur un arbre perché,
Tenait en son bec un fromage.
Maître renard, par l’odeur alléché,
Lui tint à peu près ce langage :
« Hé ! bonjour, Monsieur du Corbeau.
Que vous êtes joli ! que vous me semblez beau !
Sans mentir, si votre ramage
Se rapporte à votre plumage,
Vous êtes le phénix des hôtes de ces bois. »
À ces mots, le corbeau ne se sent pas de joie ;
Et pour montrer sa belle voix,
Il ouvre un large bec, laisse tomber sa proie.
Le renard s’en saisit, et dit : « Mon bon monsieur,
Apprenez que tout flatteur
Vit aux dépens de celui qui l’écoute.
Cette leçon vaut bien un fromage sans doute. »
Le corbeau honteux et confus,
Jura, mais un peu tard, qu’on ne l’y prendrait plus.

En route…

Lignaigrettes
Le coton de chez nous : les linaigrettes
Dessin dans les arbres
Ouvrez l’œil
Végétation des Tourbières
Des airs de Toundra
Une fourmi
Un indice vers la prochaine fable
Cigale et fourmi
Là, ça devient évident
Pendule La cigale et la fourmi
Vous chantiez, j’en suis forte aise…

La Cigale, ayant chanté
Tout l’été,
Se trouva fort dépourvue
Quand la bise fut venue :
Pas un seul petit morceau
De mouche ou de vermisseau.
Elle alla crier famine
Chez la Fourmi sa voisine,
La priant de lui prêter
Quelque grain pour subsister
Jusqu’à la saison nouvelle.
« Je vous paierai, lui dit-elle,
Avant l’août, foi d’animal,
Intérêt et principal. »
La Fourmi n’est pas prêteuse :
C’est là son moindre défaut.
« Que faisiez-vous au temps chaud ?
Dit-elle à cette emprunteuse.
— Nuit et jour à tout venant
Je chantais, ne vous déplaise.
— Vous chantiez ? J’en suis fort aise.
Eh bien ! Dansez maintenant. »

Et celle-ci, la devinez-vous ?

Pendule le paon se plaignant à Junon
Le paon se plaignait…

Le Paon se plaignait à Junon.
 » Déesse, disait-il, ce n’est pas sans raison
Que je me plains, que je murmure :
Le chant dont vous m’avez fait don
Déplaît à toute la nature ;
Au lieu qu’un Rossignol, chétive créature,
Forme des sons aussi doux qu’éclatants,
Est lui seul l’honneur du printemps.  »
Junon répondit en colère :
 » Oiseau jaloux, et qui devrais te taire,
Est-ce à toi d’envier la voix du Rossignol,
Toi que l’on voit porter à l’entour de ton col
Un arc-en-ciel nué de cent sortes de soies ;
Qui te panades, qui déploies
Une si riche queue, et qui semble à nos yeux
La boutique d’un lapidaire ?
Est-il quelque oiseau sous les cieux
Plus que toi capable de plaire ?
Tout animal n’a pas toutes propriétés.
Nous vous avons donné diverses qualités :
Les uns ont la grandeur et la force en partage :
Le Faucon est léger, l’Aigle plein de courage;
Le Corbeau sert pour le présage ;
La Corneille avertit des malheurs à venir ;
Tous sont contents de leur ramage.
Cesse donc de te plaindre, ou bien pour te punir
Je t’ôterai ton plumage.

La balade se termine

Revenus à notre point de départ, nous passons devant la cabane du Tourbier qui reproduit ce qu’était cette maisonnette des ouvriers de la tourbe.

La cabane du Tourbier
Une cabane accueillante

Et pour terminer un reportage sur ce qu’était l’exploitation de la tourbe aux Ponts-de-Martel.

Au moment de quitter le bas du village, j’entends une voix indignée : eh oui, on a oublié la fable des deux chèvres. Et ça en a vexé au moins une :

Chèvre
Et moi, on m’a oubliée

Au plaisir de lire vos commentaires, peut-être après la visite de cette exposition.

Écoute le vent

Une balade à Marin, et plus précisément à La Tène, nous a fait entendre et sentir le vent qui agitait le Lac de Neuchâtel. Petite promenade entre plage et forêt, en contournant le camping et en longeant la Thielle qui a mis nos oreilles en éveil. Bruits des flots, chants d’oiseaux, cris étranges, moteurs de voitures, tout y est pour passer un bon moment à l’écoute du vent et des bruits qu’il transporte.

Samedi de Pentecôte. Après de longues journées grises et pluvieuses, le soleil refait son apparition, mais le frais est encore bien présent. Nous décidons d’aller dans le Bas, marcher un peu là où le paysage nous est moins familier. Là aussi où nous comptons bien trouver un ciel azur. Le calendrier me rend plus attentif à la présence du vent, ou du souffle. Autant de manières d’essayer de parler de l’Esprit qui enflammera les disciples et qui les fera parler. Car demain, nous nous souviendrons que nous sommes des êtres animés de cet Esprit venu comme un vent :

Quand le jour de la Pentecôte arriva, ils étaient tous rassemblés au même endroit.  Tout à coup, un grand bruit survint du ciel : c’était comme si un violent coup de vent s’abattait sur eux et remplissait toute la maison où ils se trouvaient assis.  Au même moment, ils virent apparaître des sortes de langues qui ressemblaient à des flammèches. Elles se séparèrent et allèrent se poser sur la tête de chacun d’eux. Aussitôt, ils furent tous remplis du Saint-Esprit et commencèrent à parler dans différentes langues, chacun s’exprimant comme le Saint-Esprit lui donnait de le faire.
Actes des Apôtres 2, 1-4

Notre balade nous fait passer d’abord par la plage. Le Lac est agité, l’écume borde les vagues qui s’écrasent au pied des rochers. On longe alors La Thielle et nous découvrons des embarcations imposantes d’un autre temps, dirions-nous.

embarcations
Des embarcations d’un autre temps
embarcations anciennes
Retour vers le passé

Nous empruntons un chemin forestier qui nous fait tendre l’oreille à la recherche des oiseaux qui s’envolent et chantent à cœur joie. Les plus sportifs pourront s’exercer au parcours Vita qui sillonne les bois. Revenu à la plage nous continuons en longeant le Lac, en direction du chef-lieu.

En longeant le Lac
Bel horizon en longeant le Lac

Bords du Lac

Ponton

Ponton et roseaux
De tels paysages sont sources d’inspiration pour l’artiste
Retouche numérique de la photo

Soudain des bruits étranges attirent notre attention, avez-vous deviné ? Cherchez bien sur cette image, vous découvrirez la cause de notre étonnement.

Des bruits étranges
Observez bien, vous découvrirez qui nous a fait tendre l’oreille.

Allez, je vous le dis : ce sont des grenouilles. Elles doivent, elles aussi, sentir le printemps et l’arrivée prochaine de l’été.

Enfin, un joli chemin nous fait passer sous un arc végétal et nous retrouvons notre point de départ.

Arc végétal
La nature nous montre où regarder

Jolis coins de forêt

Cette balade, comme toutes les autres d’ailleurs, nous invite à retrouver notre équilibre intérieur, à nous recentrer, à chercher où est notre point de gravité. Une sculpture nous le rappelle d’une jolie manière. J’y vois toute la diversité et en même temps une belle unité qui nous fait aller du centre à la périphérie, à moins que ce ne soit l’inverse. Encore un clin d’œil à la Pentecôte, l’Esprit n’en fait qu’à sa tête :

Le vent souffle où il veut, et tu en entends le bruit; mais tu ne sais d’où il vient, ni où il va.
Évangile de Jean 3, 8

Sculpture de cailloux
En quête d’équilibre

Bon week-end de Pentecôte… À l’écoute du vent.

Sur les bords de l’étang

Des airs de paradis. N’ayons pas peur des mots! Quand on se promène aux bords de l’Étang de la Gruère, on a vraiment l’impression de goûter à quelque chose de la sérénité naturelle ou de la Nature (avec un grand N) sereine. À quelques kilomètres de Saignelégier (JU), dans les Franches-Montagnes, le lieu à l’écart du trafic routier, offre une occasion de méditer en marchant.

Commençons d’abord par lire ce que dit le site de Jura-Trois-Lacs à propos de cet endroit :

Réserve naturelle d’importance nationale, l’Etang de la Gruère est un havre de paix et un paradis pour les amoureux de la nature. Le sentier aménagé tout autour vous invite à la découverte de sa faune et de sa flore particulières.

Site Jura-Trois-Lacs

Les mots ne sont pas galvaudés. On s’y sent bien.

Ayant laissé la voiture au parc, nous traversons la route et rejoignons l’étang par un chemin et un ponton de bois à travers de hautes herbes. Arrivés là, sur les rives, on s’arrête. Les mots nous ont manqué : « C’est magnifique ! » Le ciel se mire dans l’onde. La cime des sapins apparaît d’abord dans le miroir du lac, les nuages donnent un blanc laiteux à l’eau. On se sent vite poète.

LEtang de la Gruère
Un havre de paix aux airs de paradis

Le chemin pédestre est bien marqué. On n’est rarement seuls. On croise, dépasse et rejoint d’autres marcheurs et marcheuses. On attend que l’un ait pris la photo. On se salue sans se connaître, parfois d’un grüezi! Les haltes sont fréquentes pour admirer ce qui s’offre à nos yeux. On prend le temps. Le paysage change : tantôt au bord de l’eau, tantôt dans la forêt, à découvert ou sous la canopée. Chaque contour offre un autre point de vue.

Si on laisse le vent nous murmurer des mots d’il y a longtemps, on pourrait bien entendre ceux du Livre des Commencements :

Puis Dieu dit: Que la terre produise de la verdure, de l’herbe portant de la semence, des arbres fruitiers donnant du fruit selon leur espèce et ayant en eux leur semence sur la terre. Et cela fut ainsi. La terre produisit de la verdure, de l’herbe portant de la semence selon son espèce, et des arbres donnant du fruit et ayant en eux leur semence selon leur espèce. Dieu vit que cela était bon.
Genèse 1, 11-12

Un lieu propice à la méditation
Et Dieu vit que cela était bon!

Des panneaux didactiques expliquent la formation de cet étang et qu’il est creusé dans une tourbière. Cela n’est pas sans rappeler le paysage du Bois des Lattes ou du Sentier des Tourbières des Ponts-de-Martel. Ceci explique cela. On trouvera de plus amples informations sur le site du Centre Naturel des Cerlatez.

En parcourant la portion de chemin dans la forêt, je prends conscience du temps qu’il a fallu à ce lieu pour être ce qu’il est aujourd’hui. Les sapins et autres bouleaux sont les témoins d’une longue histoire. Je dis bouleaux, n’étant pas certain que le vocable Biolles soit connu dans le Jura, mais peut-être.

Le paradis des bouleaux
Bouleau – ou Biolle – au bord de l’étang.

Entre lac et troncs, je pense encore à l’image de l’arbre, notamment celle du Psaume premier :

Heureux l’homme qui ne marche pas selon le conseil des méchants, Qui ne s’arrête pas sur la voie des pécheurs, Et qui ne s’assied pas en compagnie des moqueurs,
Mais qui trouve son plaisir dans la loi de l’Éternel, Et qui la médite jour et nuit!
Il est comme un arbre planté près d’un courant d’eau, Qui donne son fruit en sa saison, Et dont le feuillage ne se flétrit point: Tout ce qu’il fait lui réussit.
Psaume 1, 1-3

La balade permet de nombreuses pauses, des haltes bienvenues, au soleil ou à l’ombre, sur la berge ou sur une pierre. Il peut arriver que le dormeur soit dérangé par des canards curieux ou en recherche de nourriture. On peut bien sûr pique-niquer à l’envi, tout en prenant soin de ne pas laisser ses déchets derrière soi.

📺 À voir le reportage du 19h30 du 12 mars 2021.

J’aime particulièrement ces contrastes, ces tronçons de chemins dans la verte forêt, où il fait un peu plus frais, même si la majorité de la balade se fait sous la frondaison. On regarde où on met les pieds pour ne pas trébucher sur une racine à fleur de terre.

Chemin dans la forêt
Regardez où vous mettez les pieds. Le chemin est tortueux

Sans se presser, en prenant le temps et le pas du Promeneur émerveillé, le tour de l’Étang peut dépasser l’heure, mais l’itinéraire est vraiment facile et adapté aux familles. Les enfants iront de découvertes en découvertes.

Parvenus à notre point de départ, et après la nourriture spirituelle, nous ressentons le besoin de calmer nos estomacs; il est près de midi. Nous nous installons sur la terrasse de l’Auberge de la Couronne, au lieu-dit La Theurre, à la sortie de Saignelégier. C’étati le temps où les restaurants étaient encore ouverts. La cuisine y est excellente, locale et de saison. Je recommande le Burger de la Theurre.

L'Auberge de la Couronne
Une halte incontournable à deux pas de l’Étang de la Gruère

Profitant encore du soleil de cet automne (car nous avons fait cette balade le dimanche du Jeûne), dégustant le café, je repense à l’Ecclésiaste, car tout peut devenir source de méditation :

Il n’y a de bonheur pour l’homme qu’à manger et à boire, et à faire jouir son âme du bien-être, au milieu de son travail; mais j’ai vu que cela aussi vient de la main de Dieu.
Qui, en effet, peut manger et jouir, si ce n’est moi? Car il donne à l’homme qui lui est agréable la sagesse, la science et la joie…
Ecclésiaste 2, 24-26

Je ne sais pas si nous avons vu la main de Dieu, mais nous avons vu les beautés de la Création, la Nature dans ses plus beaux atours. Et cela nous a réjoui le cœur, l’âme et l’esprit, en mettant nos soucis et préoccupations du moment un peu à l’écart.

Retour aux sources

Le retour aux sources a souvent des parfums de douceur. On aime revenir à ses racines. Le retour que je vous propose ici nous fera découvrir des sources d’eaux amères. Sulfureuses pour l’une, ferrugineuses pour l’autre. Des particularités liées à la géographie des lieux : les marais des Ponts-de-Martel.

Pour cette nouvelle balade, je vous invite à me rejoindre là où j’habite. J’aimerais vous faire découvrir les sources d’eaux amères. Elle me font penser à Mara. À chaque fois que je passe près de ces sources, je me souviens de cet épisode du peuple de Dieu en marche vers la Terre promise et qui se plaint de la soif.

Sur ordre de Moïse, Israël quitta la mer des Roseaux et prit la direction du désert de Shour. Ils marchèrent pendant trois jours dans le désert sans trouver de point d’eau. Ils arrivèrent à Mara où il y avait de l’eau, mais ils ne purent pas en boire parce qu’elle était amère – d’où le nom de Mara, Amertume. Alors le peuple se plaignit de Moïse en disant : Qu’allons-nous boire ? Moïse implora l’Eternel, qui lui indiqua un bois d’une certaine espèce qu’il jeta dans l’eau, et l’eau devint potable.

Exode 15, 22-25

Mais revenons à notre balade. Le village des Ponts-de-Martel, dans le Jura neuchâtelois, est célèbre pour ses Tourbières, son Centre sportif et sa fromagerie, entre autres. Mais son marais recèle une curiosité, ou plutôt deux : des sources d’eau. L’une ferrugineuse et l’autre sulfureuse. La balade d’un peu plus d’une heure et demie aller-retour depuis le parking du Centre sportif ou de la gare nous emmène dans la Vallée, au pays des Biolles (ou bouleaux) et de la tourbe.

La balade peut revêtir différents atours au gré des saisons. Celle que je vous propose sera parée de blanc, celui d’un hiver où bise et vent jouent à cœur joie les trouble-fêtes.

En route…

Quittant la route cantonale direction Martel-Dernier, nous tournons à gauche pour rejoindre un chemin blanc bordé d’une allée de  Biolles. D’un côté, la Vallée s’offre à perte de vue et le majestueux Creux-du-Van (qui n’a rien à envier au Matterhorn !) nous regarde de toute sa hauteur. Parfois pudique, il se drape d’un brouillard opaque. Au fond, on découvre un serpent d’eau, le Bied. De l’autre, ce sont les forêts des Tourbières, où la terre noire apparaît à quelques endroits de leur manteau blanc.

L’émission Couleurs locales de la RTS a consacré un reportage à ces marais de tourbe. On y retrouver mon ami Serge-André.

La progression est facile, le terrain est plat et la neige crisse sous nos pas. Le froid pique le visage, bonnet et gants sont de rigueur !

Vallée des Ponts-de-Martel
Le Bied serpente au fond de la Vallée

Au gré d’un contour, l’autre côté de la Vallée se donne à voir : Brot-Plamboz et ses fermes, plus loin à l’horizon, on pourrait voir le Rondel et le Joratel. Les sources sont toutes proches, dans un encaissement. Un panneau indicateur jaune renseigne les promeneurs.

En été, lorsqu’il fait chaud, une odeur âcre et tenace, celle d’œufs pourris, confirme qu’on arrive aux sources. Mais, aujourd’hui, le froid empêche les effluves de nous chatouiller les narines.

On y est ! Sentez ! Santé !

Un étroit sentier conduit à ces sources. La première est celle de l’eau sulfureuse, contenant du soufre.

Eau sulfureuse
Pas de doute, on y est… à la source

Pour découvrir la seconde, il faut passer un petit pont, et voici la source d’eau ferrugineuse, chère à Bourvil. Celle-ci a une couleur de rouille. Toutes deux ont des vertus sanitaires, notamment pour soigner l’anémie, pour aider à la digestion, et même pour guérir de l’alcoolisme !

Source d'eau ferrugineuse
L’alcool, non ! Mais l’eau ferrugineuse, oui !

Les plus courageux pourront s’aventurer à goûter ces « doux » breuvages aux saveurs si particulières. Pour ma part, j’en resterai à ce que je peux lire sur les panneaux explicatifs.

Si on en profitait pour méditer ?

Près de ces sources, il y a une place de pique-nique. Quand la météo s’y prête, on peut s’y arrêter et méditer. Laisser ses pensées s’envoler, se centrer sur sa respiration, écouter sa voix intérieure. Puis, des mots viennent, murmurés, à peine audibles. Prêtons-leur l’oreille et le cœur :

Avez-vous déjà vu de l’eau douce et de l’eau salée jaillir d’une même source par la même ouverture ? Un figuier peut-il porter des olives, ou une vigne des figues ? Une source salée ne peut pas non plus donner de l’eau douce.

Jacques 3, 9-11

Prendre le temps de prendre conscience de cette ambivalence. En moi, en chacun de nous, sans doute aussi. L’accueillir et se dire que cela fait partie de la nature humaine. Ces eaux qui coulent à nos pied sont composées de molécules d’hydrogène et d’oxygène (H2O, si je me rappelle mes cours de chimie) et pourtant elles en ont encore d’autres qui leur donnent leurs particularités.

Mais le froid de cette journée ne nous laisse guère le loisir de nous attarder. Il est temps de rentrer.

Le retour peut se faire soit en direction des Petits-Ponts jusqu’à un arrêt de Car Postal pour rentrer aux Ponts-de-Martel, soit en poursuivant du côté de Martel-Dernier ou encore par le même chemin. Cette dernière option permet de faire face au village des Ponts-de-Martel dans toute sa largeur et sa hauteur.

Les Ponts-de-Martel
Le village des Ponts-de-Martel

Si on le souhaite, on pourra prolonger par le Sentier des Tourbiers, entretenu de mains de maître par l’association Torby.

Nous rentrons en fin d’après-midi. Les derniers rayons du soleil caressent encore l’horizon avant de disparaître. Le brouillard revient donnant une atmosphère particulière toute en nuance de gris. Le froid s’est calmé ou bien me suis-je habitué ?

Fin de journée dans la Vallée
Entre crépuscule et brouillard

Si vous passez par Les Ponts-de-Martel, sortez des sentiers battus, pour retourner aux sources de « nos » eaux sulfureuses et ferrugineuses. N’oubliez pas de vous munir de bouteilles pour en ramener chez vous et les faire déguster à vos amis. Ils vous en seront reconnaissants, à n’en pas douter.