La loi de l’Amour

Une méditation à propos de la parabole du bon Samaritain.

En préambule, une citation paraphrasée de Martin Luther King :

L’obscurité ne peut pas chasser l’obscurité ; seule la lumière le peut. La tristesse ne peut pas chasser la tristesse, seul l’amour le peut.

Texte biblique

Il était une fois un homme qui descendait de Jérusalem à Jéricho, quand il fut attaqué par des brigands. Ils lui arrachèrent ses vêtements, le rouèrent de coups et s’en allèrent, le laissant à moitié mort. Or il se trouva qu’un prêtre descendait par le même chemin. Il vit le blessé et, s’en écartant, poursuivit sa route. De même aussi un lévite [un autre religieux] arriva au même endroit, le vit, et, s’en écartant, poursuivit sa route.
Mais un Samaritain qui passait par là arriva près de cet homme. En le voyant, il fut pris de compassion. Il s’approcha de lui, soigna ses plaies avec de l’huile et du vin, et les recouvrit de pansements. Puis, le chargeant sur sa propre mule, il l’emmena dans une auberge où il le soigna de son mieux. Le lendemain, il sortit deux pièces d’argent, les remit à l’aubergiste et lui dit : « Prends soin de cet homme, et tout ce que tu auras dépensé en plus, je te le rembourserai moi-même quand je repasserai. »

Luc 10, 30-35

Message

Une histoire bien (trop) connue

On la connaît bien cette histoire, celle du bon samaritain. Elle revient à notre mémoire dès les premiers mots. Et même si c’est une vieille histoire, elle dit quelque chose pour nous ici, pour nous aujourd’hui.

En la lisant, c’est certainement la figure du samaritain, de cet étranger au peuple juif, qui retient notre attention. On s’identifie, on aimerait s’identifier à lui, à son souci de l’autre, à son dévouement, à ses gestes, à sa générosité. Et on regarde un peu vite, et de manière critique, les deux religieux qui, au nom de leurs principes, ont fait un détour. Eux, ils sont respectueux de règles et d’interdits, comme de s’approcher d’un blessé dont on sait s’il vit encore.

Eux, ils mettent la loi à la première place.

Le samaritain, lui, ne connaît qu’une loi, celle de la solidarité, celle de l’amour. Sans chercher d’abord à savoir qui est ce voyageur à demi-mort, sans chercher à connaître les circonstances de son agression, sans s’assurer d’abord qu’il est ceci et non cela, il agit… Avec ce qu’il a sous la main, ou plutôt dans les sacs sur sa mule : un peu d’huile, du vin pour soigner les plaies, une monture pour mener le blesser à l’auberge, deux pièces d’argent pour les frais… Et la promesse de revenir payer ce qui pourrait encore manquer.

C’est vrai qu’on aimerait tous ressembler à cet anonyme, qui s’est arrêté, qui a pris soin, qui a aidé et donné de son temps, de ses vivres et de son argent. Y parvenons-nous ? Nous y essayons-nous ?

Une histoire pour tous les temps

C’est une histoire qu’on connaît bien et qui parle à la plupart d’entre nous, qu’on soit fins connaisseurs de la Bible ou plus distancés des références du Grand Livre. Parce qu’avant d’être un texte évangélique, c’est une histoire de sagesse universelle.

L’épisode du bon samaritain vient aussi poser des questions, entre les lignes. Questions qu’on découvre si on prend la peine de s’arrêter un instant. Pourquoi ce voyageur a-t-il été détroussé ? Pourquoi, si Dieu, un Dieu, existe là-haut, ou là-bas, n’a-t-il rien fait pour empêcher cela ? Pourquoi les religieux n’ont-ils pas été émus par la situation tragique de ce voyageur… en bien mauvaise posture, rappelons-le, préférant passer leur chemin ?

Des questions… Encore des questions

Des questions de tous les temps. Des questions qui subsistent aujourd’hui encore, avec certainement un peu plus d’intensité à l’heure où l’humanité doit apprendre à vivre différemment. Pourquoi…

Ce texte ne répond pas à ces pourquoi. Et c’est tant mieux. Parce que la réponse appartient à chacun de nous. Ce sont nos croyances, nos convictions, nos valeurs, nos rencontres, notre vie qui orienteront la réponse, les réponses, que nous donnerons à ces pourquoi.

Mais si ce texte ne répond pas à ces grandes questions existentielles, il donne une attitude possible : oser agir. Risquer le geste qui aide, qui prend soin, se montrer solidaire. Mettre à disposition un peu de ce que nous avons pour faire du bien là où c’est à notre portée. Plutôt que d’affirmer que je ne peux pas sauver le monde – et c’est vrai – je peux faire un geste pour mon voisin, pour mon collègue, pour cet étranger, pour ce marginal, pour ce blessé de la vie. Juste ce qui est à ma portée. Pour le reste, je fais confiance à la solidarité humaine, à plus grand que soi. C’est peut-être naïf, mais je suis persuadé, je crois, que nous pouvons compter, non seulement les uns sur les autres, mais aussi sur plus que nos propres forces.

Et aujourd’hui en particulier, nous sommes confrontés à des questions dont la réponse n’est évidente pour personne : la vie, la maladie, la souffrance, la mort et après…

La vraie question à se poser est certainement celle-ci : plutôt que de se demander s’il y a une vie après la mort, demandons-nous comment nous vivons avant la mort.

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En marche

Quelques textes et extraits du culte du dimanche 11 juillet que j’ai célébré à La Neuveveville.  Partant du psaume 8 et de cette question « Qu’est-ce que l’homme pour que tu prennes soin de lui ? », je mets mon expérience à La Lanterne, l’aumônerie œcuménique de rue en Ville de Neuchâtel en lien avec la rencontre avec l’aveugle Bartimée.

Accueil

 « En marche, les humiliés du souffle ! Oui, le royaume des ciels est à eux !
En marche, les endeuillés !
Oui, ils seront réconfortés !
En marche, les humbles !
Oui, ils hériteront la terre !
En marche, les affamés et les assoiffés de justice !
Oui, ils seront rassasiés ! (…) »

C’est avec ces mots qui nous mettent en mouvement, en marche, que nous sommes accueillis et que nous nous accueillons ce matin.

Vous aurez certainement reconnu les premiers mots des Béatitudes de l’Évangile de Matthieu, le célèbre Sermon sur la montagne.

C’est à l’écrivain et penseur israélien André Chouraqui que nous devons cette interprétation où les Heureux sont En marche.

Ce matin, nous nous sommes mis en marche pour venir jusqu’ici, pour nous placer sous le regard accueillant et bienveillant de Dieu. Et nous pensons à toutes celles et tous ceux qui ne se sont pas mis en route, les accueillant aussi au milieu de nous.

La grâce et la paix vous sont données de la part de Dieu notre Père, de son Fils Jésus-Christ notre frère, dans l’unité et le souffle du Saint-Esprit.

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Prière d’humilité et annonce de la grâce

Présentons-nous devant Dieu dans la confiance qu’il nous accueille tels que nous sommes.

Seigneur,
Pour toutes ces fois où mes propres certitudes ont entravé ma marche à ta suite…
Pardonne-moi.

Pour tous les détours que j’ai pris, au lieu de répondre à ton appel de chaque jour…
Pardonne-moi.

Pour toutes les routes que j’ai empruntées et qui m’ont éloigné de toi…
Pardonne-moi.

Amen.

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Jésus le Christ a dit :

« Je suis le chemin, la vérité et la vie. » (Jn 14,6)

Et aussi :

« En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui écoute ma parole, et qui croit à celui qui m’a envoyé, a la vie éternelle et ne vient point en jugement, mais il est passé de la mort à la vie. » (Jn 5,24)

Allez dans la confiance que vous êtes passés de la mort à la vie et que la grâce de Dieu vous est donnée. Amen.

Lectures bibliques :

Psaume 8

Eternel, notre Seigneur, que ton nom est magnifique sur toute la terre! Ta majesté domine le ciel.

Par la bouche des enfants et des nourrissons, tu as fondé ta gloire pour confondre tes adversaires, pour réduire au silence l’ennemi, l’homme avide de vengeance.

Quand je contemple le ciel, œuvre de tes mains, la lune et les étoiles que tu y as placées, je dis: «Qu’est-ce que l’homme, pour que tu te souviennes de lui, et le fils de l’homme, pour que tu prennes soin de lui?»

Tu l’as fait de peu inférieur à Dieu et tu l’as couronné de gloire et d’honneur. Tu lui as donné la domination sur ce que tes mains ont fait, tu as tout mis sous ses pieds, les brebis comme les bœufs, et même les animaux sauvages, les oiseaux du ciel et les poissons de la mer, tout ce qui parcourt les sentiers des mers.

Eternel, notre Seigneur, que ton nom est magnifique sur toute la terre!

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Évangile de Marc 10, 46-52

Ce jour-là, c’est l’effervescence dans la ville de Jéricho. Le prophète, accompagné de ses disciples et d’une grande foule traverse les rues. On prend garde à ce qu’aucun gêneur n’interrompent le cortège. Tout se passe bien… Jusqu’à ce moment.

Ils arrivèrent à Jéricho. Lorsque Jésus sortit de la ville avec ses disciples et une assez grande foule, Bartimée, le fils aveugle de Timée, était assis en train de mendier au bord du chemin. Il entendit que c’était Jésus de Nazareth et se mit à crier: «Fils de David, Jésus, aie pitié de moi!» Beaucoup le reprenaient pour le faire taire, mais il criait beaucoup plus fort: «Fils de David, aie pitié de moi!» Jésus s’arrêta et dit: «Appelez-le.» Ils appelèrent l’aveugle en lui disant: «Prends courage, lève-toi, il t’appelle.» L’aveugle jeta son manteau et, se levant d’un bond, vint vers Jésus. Jésus prit la parole et lui dit: «Que veux-tu que je fasse pour toi?» «Mon maître, lui répondit l’aveugle, que je retrouve la vue.» Jésus lui dit: «Vas-y, ta foi t’a sauvé.» Aussitôt il retrouva la vue et il suivit Jésus sur le chemin.

Prédication

Chers Amis, chères Sœurs, chers Frères,

Aujourd’hui, j’ai envie de vous faire marcher ! Rassurez-vous, pas au sens où on l’entend habituellement. Non, je ne vais pas vous raconter des histoires et vous entraîner ainsi sur des chemins de traverse. Ça, non !

Non, aujourd’hui, j’ai envie de vous faire marcher sur les chemins qu’ouvrent les textes que nous venons d’entendre. J’aimerais vous entraîner à parcourir ces textes, comme on fait une balade dans un coin de pays qu’on connaît bien, ici tout près, où là-bas, un peu plus loin. Parce que ces textes, on les connaît bien justement.

Mais, avant de nous lancer, permettez-moi un petit échauffement à propos des bienfaits de la marche. C’est une activité qui libère la tête et l’esprit, qui active le cœur et le corps. Elle est recommandée par les médecins.

Comment bien marcher, au fait ? En profitant simplement, oui tout simplement, de ce qui s’offre à nos sens : regarder, sentir, écouter, toucher, goûter. C’est si simple de marcher. J’ai lu quelque part ce conseil d’un marcheur :

« Quand on marche, il ne faut pas ressasser ses soucis, ses préoccupations. Ce n’est pas comme cela que viendra la solution. Non, quand on marche, il faut se laisser toucher par ce que la nature nous offre, lâcher-prise sur tout ce qui occupe et encombre notre cerveau pour faire le vide et jouir de la nature, tout simplement. Libéré et ressourcé par la marche, alors certainement que la solution apparaîtra d’elle-même. »

Voilà une leçon que je vais essayer d’appliquer à moi-même d’abord avant de la conseiller à d’autres. Alors, mettons-la en pratique dès maintenant et laissons nos soucis sur le bord du chemin.

Pour moi, la marche est ce temps privilégié de la méditation de la Parole. Un temps où je laisse un texte, des mots, me parler, dialoguer avec le paysage que je traverse, s’adapter au rythme de mes pas et de mon souffle. Où je laisse une prière faire chemin avec moi.

Le psaume 8 est justement une invitation à regarder, à admirer la nature et à y discerner la main du Créateur. Un poème que je relis souvent, en laissant mon regard se perdre dans le ciel étoilé, ou à l’horizon d’un lac, ou vers les sommets de montagnes. Et j’entends l’écho de cette question : « Qu’est-ce que l’homme, pour que tu prennes soin de lui ? »

Oui, qu’est-ce que l’homme ? Une poussière d’étoile tombée sur terre ? Un pas grand-chose devant l’immensité d’un univers dont on n’a qu’une infime perception ?

Et pourtant, et sans détour, le poète répond à la question : « [Seigneur], Tu l’as fait de peu inférieur à Dieu, cet homme ! » Rien que cela ! Aux yeux de Dieu, l’humain, le terreux, le glébeux n’est pas insignifiant. Bien au contraire, chaque vie est voulue, précieuse ; chaque être a une valeur inestimable. Il vaut la peine de le répéter, surtout à l’heure où des vies sont oubliées, menacées, sacrifiées.

L’humain a tellement d’importance aux yeux de Dieu qu’il a voulu, lui le premier, le rejoindre dans sa création.

Il a fait le choix de parcourir les chemins d’humanité, devenant humain à son tour, pour ainsi nous conduire à regarder à son Royaume comme on scrute l’horizon. Il a voulu nous en ouvrir les portes dès aujourd’hui par Jésus son Fils.

En Jésus, Dieu le premier fait le chemin vers nous, il devient notre frère, notre prochain, notre compagnon de route, se souvenant de chacun, quoi que nous vivions.

Avec Dieu, personne n’est trop petit, aucun n’est oublié. Pas même ceux qu’on a laissés au bord du chemin, pas même ceux qu’on ignore au bord du chemin. Lui, Jésus, s’est arrêté, il a tendu l’oreille, il a poussé les foules à s’arrêter et à tendre l’oreille à leur tour.

La rencontre avec Bartimée n’est pas une histoire d’autrefois. Elle garde toute son actualité, criante et triste à la fois. Il y en a encore de ces marginaux, de ces dépendants, de ces cas sociaux, de ces anonymes qu’on ne voit plus, qu’on voudrait faire taire, parce qu’ils nous dérangent. Il y en a encore. Malheureusement. Ou heureusement peut-être qu’ils sont là, qu’ils nous réveillent de notre trop-plein d’assurances, quand ils crient que le système est foutu et corrompu !

J’ai eu l’occasion et j’ai encore cette chance de côtoyer des Bartimée, notamment à Lanterne, l’aumônerie de rue en Ville de Neuchâtel. Et je peux vous assurer qu’ils m’ont mis en marche, ces gens-là. Au-delà des premières impressions, des premières peurs aussi, j’ai découvert de belles personnes attachantes, timides, blessées qui se cachent derrière une carapace, une voix forte, une grande gueule.

Des amitiés se sont alors nouées. Oh, pas toujours, soyons honnêtes. Certaines sont restées distantes ; j’ai aussi fait preuve de prudence, mais bon, c’est ainsi. Elles sont là. Je suis là. Peut-être qu’un jour, nous ferons un pas, puis deux, puis trois l’un vers l’autre, l’un avec l’autre. Dieu seul le sait. Je lui fais confiance. Je lui laisse le temps.

En rencontrant ces gens de la rue – comme on dit – je pense souvent à Bartimée qui, sur le bord du chemin, n’a pas hésité à crier. Il n’a pas laissé la foule le réduire au silence et le rendre invisible. Parmi ces gens que je rencontre, il y en a qui crient, qui gueulent contre cette société qui se bouche les oreilles et les yeux ; qui prétend que tout va bien au regard des statistiques. Ce que nous vivons depuis plus d’un an a été un révélateur de tous ces oubliés, cachés et ignorés.

Bartimée lui savait qu’au milieu de cette foule, il y avait des oreilles pour l’entendre, des yeux pour le voir, un cœur pour l’accueillir, lui le fils de…, lui l’anonyme. Lui le maudit.

Bien qu’aveugle, Bartimée a vu jour.

Et c’est la rencontre entre deux fils : le fils de Timée et le fils de David. La rencontre de deux marginaux aussi. Et cette rencontre a tout changé : elle a arrêté une foule qui aurait voulu passer son chemin. Elle a mis en route celui qui mendiait. Maintenant, tout est changé : le mendiant ne mendie plus, il loue Dieu. Il n’est plus assis, il marche. Il n’est plus aveugle, il voit.

L’Évangile de Jean dit : « La Parole s’est faite chair et a habité parmi nous ». Mais cette parole n’est pas restée immobile, bien protégée par les murailles d’un temple. Elle a parcouru les chemins du monde.

Elle n’a pas attendu qu’on vienne à elle, elle s’est mise en route pour rencontrer des hommes et des femmes. Elle a pris corps et nom en devenant Jésus le Christ.

Par lui, elle rejoint tous ceux et toutes celles qui crient au bord des chemins tortueux de notre monde et qu’on aimerait ne pas entendre. Aujourd’hui, elle continue de parcourir le monde au rythme de nos pas et annonce cette bonne nouvelle pour qui y prête attention : « Va, ta foi t’a sauvé ».

C’est cette parole, cette parole de Vie, qui me fait, qui nous fait marcher. Alors, en route !

Amen.

Confession de foi : un Dieu en marche

Prière d’intercession

A l’image de ceux qui accompagnaient ton Fils,
Nous voulons, à notre tour marcher auprès de ceux qui souffrent physiquement et moralement. Et te les confier.

Rayonne de ta présence aimante à leurs côtés et ouvre-leur un chemin lumineux. Et nous te les nommons dans le secret de notre cœur.

A l’image de ceux qui suivaient ton Fils sur les chemins du monde, nous voulons proclamer ta grâce toujours et à nouveau.

Seigneur, exauce-nous. Amen.

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Bénédiction

Dieu parmi les hommes
Dieu sur nos chemins
Proche est ton royaume
Viens ! viens !

Nous sommes en marche vers le Royaume de Dieu qui est déjà là où nous sommes. Nous sommes en route à la suite du Christ qui nous ouvre à la rencontre, vraie et sincère. Nous sommes en marche avec nos frères et nos sœurs sous la conduite du Dieu trois fois saint et trois fois béni.

Allez dans la joie et la paix.

Que le Seigneur, notre Dieu, vous bénisse et vous garde aujourd’hui et toujours. Lui le Père, le Fils. En Marche ! Amen !

 

Au commencement : la confiance

À la veille de la fête de l’Ascension, j’ai présidé une cérémonie d’adieux. Reprenant le verset biblique choisi par la défunte, Jean 3,16, je le mets en lien avec d’autres paroles de ce même évangile.

Lectures bibliques :

Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu. Elle était au commencement avec Dieu. Toutes choses ont été faites par elle, et rien de ce qui a été fait n’a été fait sans elle. En elle était la vie, et la vie était la lumière des hommes. La lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point reçue (…)

Personne n’a jamais vu Dieu : Dieu, le Fils unique qui vit dans l’intimité du Père, nous l’a révélé.

Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle. Dieu, en effet, n’a pas envoyé son Fils dans le monde pour qu’il juge le monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui.

Évangile de Jean 1, 1-5.18 et 3, 16-17

Au commencement, il y a cet insaisissable

Au commencement de toute vie,  il y a un cri, celui du nouveau-né qui naît au monde. Il nous est impossible de l’emprisonner dans nos mains, ce cri, pour le garder et pourtant, une mère, un père, ne l’oublieront jamais.

Toute relation commence par une parole, parfois dite avec des mots, parfois exprimée par un regard ou un geste. Cette parole est tout aussi insaisissable et, pourtant, elle restera gravée dans le cœur toute sa vie durant. Il y a des paroles porteuses de vie. Il y en a d’autres qui blessent, qui tuent aussi. Les unes comme les autres peuvent accompagner, construire ou ruiner une vie. Fonder ou mettre à mal la confiance en soi et aux autres.

La confiance, justement, est encore de ces choses insaisissables et tellement vitales. On ne peut pas la serrer dans sa main, tout comme l’air que nous respirons ou la lumière qui nous fait du bien. Et pourtant, nous ne pouvons pas nous en passer.

Toute la foi, toute la relation au Dieu de Jésus-Christ est affaire de confiance. On ne peut pas l’imposer, elle ne peut qu’être éprouvée, suggérée, donnée et reçue. Sur quoi fondons-nous notre confiance en Dieu ? Sur des témoignages que les Écritures nous ont transmis au fil des siècles, sur des paroles de Jésus et de ceux qui sont venus à sa suite, sur des mots. Et on le sait, les mots peuvent paraître bien dérisoires parfois. Et pourtant.

Des mots, rien que des mots, plus que des mots, une certitude

«Dieu a tant aimé le monde». Des mots forts qui peuvent changer l’image de Dieu. Dieu qui, au passage, n’est pas plus saisissable que la vie, la parole ou la confiance, mais tout aussi vital. Ces quelques mots nous rappellent  que si Dieu aime, ce n’est pas en faisant le tri parmi ceux qui mériteraient d’être aimés et ceux qui ne le mériteraient pas. Dieu a aimé et aime encore le monde, l’humanité, dans toute sa diversité. A chacun, à chacune, il adresse des mots qui font du bien, qui disent son amour, qui fondent la confiance, qui sont porteurs d’une promesse. Et pour que cette promesse ne reste pas de simples mots qui se perdraient dans un gros livre qu’on affirme être La Parole de Dieu, Dieu leur a donné corps, en envoyant son Fils dans le monde. Il a fait mieux encore : il est devenu, en Jésus-Christ, notre frère en humanité, il nous a rejoints pour nous conduire à lui. En faisant cela, il nous adresse sa promesse : «afin que quiconque croit en lui ne périsse pas mais qu’il ait la vie éternelle». Une vie, faite de relations, que rien, même pas la mort, ne peut séparer.

Aujourd’hui, nous sommes devant le mystère et de la vie et de la mort, ce mystère qui nous échappe encore et toujours. Nous sommes face à un mystère, mais pas un vide sidéral, car je suis persuadé que Dieu, s’il ne nous donne pas toutes les réponses à nos questions, est notre réponse, du moins une réponse possible, un peu plus possible que d’autres. Il nous accompagne et nous pouvons lui adresser nos interrogations, avec nos mots, parfois hésitants, nos doutes, parfois tenaces, nos émotions, souvent indomptables.

Tenter de poser des mots sur l’insaisissable

Alors, s’il fallait garder une image, une parmi d’autres, je dirais que Dieu est cette lumière qui brille dans l’obscurité. Une lumière qui n’éblouit pas, mais qui rassure, qui donne un sentiment de sécurité, un peu comme les veilleuses dans les chambres des enfants, chassant les fantômes de la nuit. Dieu échappera toujours à toutes nos tentatives de le saisir, mais il n’en sera que plus proche et souvent, sans que nous l’apercevions. Dieu est là où nous ne l’attendons plus. Il est là où on est certain de ne pas le trouver. Il nous ouvre à la vie aujourd’hui et toujours.

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Qui es-tu ?

En ce troisième dimanche du temps de l’Avent, les textes proposés nous invitent à la rencontre avec Jean, celui qu’on appelle le Baptiste. Est-il celui qu’on attendait. « Qui es-tu ? » La question lui est posée. Elle nous est posée à nous aussi dans notre marche commune vers Noël.

Accueil

Ce matin aurait pu ressembler à tous les autres matins. Et pourtant, il n’a rien d’ordinaire.

D’abord, parce que nous pouvons à nouveau et enfin nous rassembler et nous revoir. Ensuite, parce l’extraordinaire de Dieu jaillit dans l’ordinaire de nos vies. Enfin, parce que Dieu nous accueille et nous rend visite dans ce que nous vivons. Il est là, avec nous et au milieu de nous.

Ce matin ne ressemblera plus à tous les autres matins. Il a quelque chose d’extraordinaire.

Que la grâce et la paix vous soient données de la part de Dieu notre Père, de Jésus-Christ son Fils et notre Sauveur dans le souffle et l’unité du Saint-Esprit.

Amen.

Invocation

Nous t’attendons, Seigneur notre Dieu, le cœur en éveil.

C’est par toi que nous vivons, car c’est toi qui renouvelles nos forces et notre espérance et qui donnes à notre vie son centre de gravité et son fondement.

Entends nos prières, accueille notre louange, éclaire notre vie, nourris notre foi.

Et que cette heure nous rapproche de toi et des autres, et surtout de ceux qui ne sont pas là avec nous, afin qu’ensemble, tous ensemble, nous formions la famille de tes enfants.

Amen !

Lectures

Textes du jour : Esaïe 49, 5-9 et 13 et Jean 1, 6-9 et 19-28

Voici le témoignage de Jean lorsque les Juifs envoyèrent de Jérusalem des prêtres et des Lévites pour lui demander : « Toi, qui es-tu ? »

Il déclara et sans restriction affirma : « Moi, je ne suis pas le Messie. »

Ils lui demandèrent : « Qui es-tu donc ? Es-tu Elie ? »

Et il dit : « Je ne le suis pas. »

« Es-tu le prophète ? »

Et il répondit : « Non. »

Ils lui dirent alors : « Qui es-tu ? Nous devons donner une réponse à ceux qui nous ont envoyés !  Que dis-tu de toi-même ? »

« Moi, dit-il, je suis la voix de celui qui crie dans le désert : ‘Rendez le chemin du Seigneur droit’, comme l’a dit le prophète Esaïe. »

Prédication

Les temps changent… Soudain

Cette année nous a donné un autre rapport au temps. Plus de temps que nous imaginions en avoir. Ou du temps qui nous venait à manquer parfois. Souvenez-vous, quand on courait d’un rendez-vous à une réunion. Quand on essayait de « caser » une fête de famille pour que chacun soit là, jonglant avec les agendas surchargés. Quand on ne savait plus vraiment prendre du temps, du bon temps.

Et soudain, voilà du temps à accueillir, à occuper, à remplir.

Au début, c’était étrange. Il y a eu deux attitudes que j’ai remarquées : la première, celle du soulagement : « Enfin, je vais pouvoir me reposer, prendre soin de moi, faire tout ce que j’ai remis à plus tard… Les rangements, notamment ! »

Et une autre, plus angoissante : « Que vais-je faire de mes journées ? »

Mais, peut-être aussi que ce printemps, cette année n’ont rien changé à votre rythme de travail.

Alors, peu à peu, on s’est habitué à cette situation. Pas le choix. Il fallait faire avec. Alors s’est posée la question : comment passer ces journées qui soudain pouvaient se dérouler différemment ?

Relire les classiques

Peut-être en avez-vous profité pour lire ou relire des classiques de la littérature. Découvrir de nouveaux auteurs contemporains ou regarder des films et séries en ligne et en boucle !

Pour ma part, j’aurais aimé relire la saga « Les Misérables » de Victor Hugo. J’aurais aimé me replonger dans cette histoire.

Mais, le temps m’a manqué. Eh oui ! La pastorale du téléphone et la pastorale de l’écran ne m’ont pas laissé suffisamment de temps.

Alors, en cette période de l’Avent, chargée elle aussi, je me rattrape en relisant avec plaisir les textes des Évangiles qui nous préparent à Noël. J’aime le faire chaque année. Je vois ainsi le décor se mettre peu à peu en place. Je découvre l’un après l’autre les personnages qui me font regarder vers la crèche, vers l’enfant à naître, vers la lumière du monde venue éclairer nos vies.

Et parmi eux, il y a Jean le Baptiste qui n’est pas sans me rappeler Jean Valjean, le héros des Misérables. Car, tous les deux sont un trait d’union entre deux temps, entre deux tomes d’une même histoire. Jean Valjean, passant du bagne de Toulon à la haute société de Paris, sous le nom de M. Madeleine qui reste une énigme à percer pour l’inspecteur Javert.

Et Jean le Baptiste, au bord du Jourdain, qui reste pour beaucoup aussi un personnage énigmatique.

Un trait d’union : « On se disait que… Peut-être… »

Jean-Baptiste nous permet de faire le lien entre le premier Testament et le second. Il nous rappelle que c’est bien une seule et même histoire qui se joue. Mais, on se pose cette question. Mais on lui pose cette question : « Qui es-tu ? » Et Jean chasse d’un revers de main toutes les spéculations qu’on pouvait faire à son sujet. Il n’est ni le Messie, ni Elie, encore moins le prophète qui étaient attendus.

Parce qu’au temps de Jean, les promesses qui annonçaient le Messie, l’envoyé de Dieu, qui affirmaient qu’Elie allait revenir ou qu’un prophète allait se lever étaient dans toutes les mémoires.

On guettait des signes qui diraient que les choses allaient changer, que les prophéties allaient se réaliser, qu’on avait raison de ne pas désespérer, qu’on avait raison de croire toujours et encore.

Alors, en voyant Jean baptiser aux bords du Jourdain, on se dit que… On espère que … Et on veut en avoir le cœur net : « Qui es-tu ? »

Jean répond : il est une voix. La voix de celui qui crie dans le désert.

De prime abord, je voyais cette voix se perdre, emportée par le vent, ricochant d’écho en écho, dans un lieu vide. Mais, en y réfléchissant, je comprends que le désert est le lieu privilégié de la rencontre avec Dieu, ce lieu qui place chacun face à Dieu et à lui-même. Souvenez-vous, par exemple, de Jésus au désert juste après son baptême par Jean, justement.

« Qui es-tu ? » Cette question n’est pas lancée en l’air, elle fait au contraire son chemin dans notre cœur et notre être, jusque dans nos profondeurs, mais aussi dans ce vis-à-vis avec Dieu qui se tient là. Silencieux vis-à-vis qui écoute.

Jean est cette voix qui rend témoignage. Cette voix qui annonce un chemin vers celui qui est la lumière du monde. Cette lumière que Dieu vient déposer dans notre monde et dans nos vies. Il annonce celui qui est déjà là, mais que personne ou presque n’a remarqué. Jean annonce que les prophéties d’Esaïe sont sur le point de se réaliser, là sous les yeux de ceux qui sont aux bords du Jourdain.

Se rappeler que Dieu n’oublie pas

Il affirme ainsi qu’on a raison de croire, de ne pas désespérer. Qu’on aurait tort de se résigner, pensant que le temps emporte tout vers l’oubli. Car on le sait, Dieu n’oublie pas !

En relisant le début de l’Évangile de Luc, on découvre que Dieu a entendu la prière du prêtre Zacharie et qu’il ne l’a pas oubliée :

Ta femme Elisabeth – dit le messager – te donnera un fils et tu l’appelleras Jean.

Jean… ce sera le Baptiste.

Je ne sais pas, mais il me plaît de croire que le vieux Zacharie avait peut-être tiré un trait sur son désir d’être père, qu’il avait abandonné l’idée, se disant que c’était sans doute trop audacieux ou trop tard de demander à Dieu une descendance. Mais rien n’est impossible à Dieu.

Jean rend témoignage. C’est-à-dire qu’il affirme une vérité. Celui qui vient, le Christ, le Messie annoncé, est aux portes du Jourdain. Jean prépare le chemin, comme on prépare jour après jour la crèche, mais il se retirera pour donner tout l’espace, toute la place à Jésus-Christ.

Tous en route…

A l’image de Jean, les personnages de la crèche que sont Joseph et Marie, les bergers, les mages venus de loin, les anges dans le ciel, tous nous entraînent à nous mettre en route, au moins intérieurement vers Bethléem. À regarder celui qui est sur le point de naître. Par leurs témoignages, parfois teintés de doutes, et c’est tant mieux, ils nous entraînent dans leur histoire qui devient alors la nôtre aussi.

Qui ne s’est pas, au moins une fois, identifié à Marie, à Joseph, à Jean Valjean ou à Cosette des Misérables ? On dirait, pour de faux…

Une histoire pour tous et qui s’adresse à tous

C’est cela qui est beau dans ces histoires : elles nous posent, chacune à sa manière, cette question : « Qui es-tu ? » « Que dis-tu de toi-même ? »

Ces histoires nous mettent face à nous-mêmes et nous invitent à regarder au-delà de ce que nous voyons, prenant conscience qu’il y a en chacune d’elles une part d’universel et en chacun de nous une part de divin.

Après Jean viendra Jésus de Nazareth qui racontera, à son tour, l’histoire de Dieu et des hommes. À Jésus, on posera cette même question « Qui es-tu ? » Dieu répondra : « Tu es mon Fils bien-aimé ».

Et Jésus mettra aussi ceux et celles qui croiseront son chemin face à cette même question : « Qui es-tu ? » Et il donnera sa réponse, celle de Dieu : « Tu es celui ou celle en qui Dieu place toute son affection ».

Je crois qu’il est bon de relire, toujours et encore, ce que nous croyons connaître, les Évangiles ou Les Misérables. Il est bon aussi d’avancer sur le chemin de l’Avent, et de la rencontre, avec cette question adressée à soi d’abord et aux autres ensuite : « Qui es-tu ? »

Amen.

Confession de foi

Ô Dieu de la vie,

Nous croyons que tu soutiens la petite flamme qui s’obstine à briller dans notre cœur.

Nous croyons que tu renouvelles notre courage quand il risque de disparaître.

Nous faisons confiance à tous les petits signes qui nous aident à attendre le jour de ta venue.

Nous croyons à la force d’une rencontre qui nous permet d’espérer les retrouvailles.

Nous avons l’espoir indestructible qu’un jour nous verrons notre sauveur.

Nous croyons en ton fils Jésus, qui vient tout fragile nous rencontrer dans la pauvreté.

Amen.

Prière d’intercession

Nous ouvrons nos mains et nos cœurs pour prier :

Seigneur,

Sur ce chemin qui nous conduit à la rencontre de ton Fils bien-aimé, apprends-nous à vivre chaque jour en servantes et serviteurs, en témoins, nous mettant à l’écoute de ta voix et à celle de nos frères et sœurs en humanité. Dans le monde, dans notre petit monde, ici, tout près, montre-nous le service que tu attends de chacun. Et donne-nous cette joie de le partager avec d’autres, eux aussi en chemin.

Seigneur,

Que notre service prenne la forme du témoignage en paroles et en actes et qu’ensemble nous portions ta lumière auprès de ceux qui ont abandonné tout espoir.  Nous te confions tous ceux qui vivent difficilement ces jours, ceux qui sont loin de chez eux, qui souffrent à cause de la maladie, de la séparation, de la solitude. Nous te confions tous ceux qui ne ménagent ni leur temps ni leurs efforts pour aider, soigner, accompagner. Rends-nous attentifs, oreilles grandes ouvertes, à leurs cris.

Faisons silence. Dans le secret de notre cœur, prions le Seigneur.

Membres d’une même famille, enfants d’un même Père, animés d’un même Esprit, nous pouvons dire, avec confiance, la prière que Jésus nous a lui-même enseignée :

Notre Père qui es aux cieux,

Que ton nom soit sanctifié,

Que ton règne vienne

Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.

Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour.

Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés

Et ne nous laisse pas entrer en tentation, mais délivre-nous du mal

Car c’est à toi qu’appartiennent le règne, la puissance et la gloire

Aux siècles des siècles. Amen

Envoi et bénédiction

Les portes vont s’ouvrir, nous allons retrouver les visages connus, d’autres que nous aurons peut-être de la peine à reconnaître, les rues de notre ville et ses vitrines décorées, la maison qui nous est familière, la peine des malades, les joies, les solitudes, les émotions à fleur de peau : la vie comme elle est.

Redis-nous, ô Père, que nous n’avons pas rêvé.

Redis-nous, ô Père, que de l’extraordinaire a jailli dans notre ordinaire.

En Jésus, tu nous fais la grâce d’une nouvelle naissance, par lui, tu nous donnes la vie pour les siècles des siècles.

Que le Seigneur de toute éternité dépose sa lumière en vos cœurs, qu’il fasse luire au plus profond de votre être la flamme de l’espérance. Ce feu qui ne s’éteint jamais.

Que le Seigneur vous bénisse et vous garde, aujourd’hui, demain et tous les jours.

Lui le Père, le Fils et le Saint-Esprit.

Amen.