blog

Un moment culte

La pasteure Sandrine Landeau de l’EPG répond à un internaute sur le site jecherchedieu.ch au sujet du « devoir du culte ». Sa réponse dont je relaie quelques éléments m’inspire des réflexions personnelles tirées de ma pratique et de mes expériences que je partage ici.

Faut-il ? Doit-on ?

La question pose l’obligation d’aller, d’assister, de participer au culte.

Dans le christianisme, et particulièrement dans le christianisme d’expression réformée, il n’y a pas d’obligation de venir au culte, ni d’ailleurs de prier comme ceci ou comme cela, à telle heure ou à telle autre. Ce n’est pas que le culte n’est pas important, c’est juste que Dieu ne va pas nous en vouloir ni nous punir si nous n’y allons pas.

J’ai rencontré des personnes, tout au long de mes divers engagements et ministères, qui s’excusaient de ne pas pouvoir, de ne pas avoir pu, d’avoir oublié de venir au culte. Comme si elles allaient être punies d’avoir manqué ce moment. J’ai toujours répondu que le culte était une invitation, pas une obligation. On va au culte pour de nombreuses bonnes raisons, mais si on y va parce qu’on se sent obligé, ou parce qu’on nous oblige à y aller, alors c’est une mauvaise raison.

J’ai été agacé par l’empressement de certains responsables d’Église à reprendre les célébrations, à demander (instamment) au Conseil fédéral de permettre les rassemblements religieux à fin mai 2020, alors que l’épidémie de la Covid laissait encore beaucoup de questions sans réponse.

Dieu n’est pas un Dieu qui oblige, mais un Dieu qui propose, qui dialogue. Quand Jésus résume la Loi de Dieu, c’est l’amour qui reste, pas le culte.

Voilà sans doute ce qu’il y a retenir : l’amour et comme le rappelle l’apôtre Paul : l’amour pardonne tout, aussi bien les blessures profondes que les manquements au culte. On est bien d’accord qu’on n’aimera pas plus celui ou celle qui est habitué.e au culte que celui ou celle qui n’y va jamais.

Le culte, pour qui ?

Ensuite, le culte n’est pas réservé aux fidèles, à celles et ceux qui fréquentent régulièrement le culte. Il est ouvert à tous et toutes : les régulier.ère.s comme les moins régulier.ère.s, les hommes comme les femmes, les noir.e.s comme les blanc.he.s, les adultes comme les enfants, les passionné.e.s comme les simples curieux.ses qui passaient là et cherchent à s’abriter de la pluie ou du soleil, les intéressé.e.s comme ceux qui viennent pour accompagner leur grand-mère et lui faire plaisir. Tout le monde est bienvenu (…)

Nous touchons là au coeur de la question : à qui s’adresse le culte ? Qui vient au culte ?

  • Les fidèles, les réguliers : donc ceux qui sont là tous les dimanches ? Alors avouons que s’ils sont fidèles, ils ne pas aussi nombreux qu’on pourrait le souhaiter. Et les statistiques nous montrent qu’ils deviennent de moins en moins nombreux;
  • Les paroissiens ? Alors, ils ne sont pas tous là, et on est loin du compte, même lors de célébrations particulières. Rassembler une centaine de participants, c’est très bien, mais si la paroisse compte 1’000 membres inscrits, ce n’est que 10%.
  • Les occasionnels ? Alors, il est important de les accueillir avec chaleur, leur souhaitant une vraie bienvenue, plutôt qu’un regard réprobateur qui dit : « Ça fait longtemps qu’on ne vous a pas vu ! »
  • Les gens de passage, à la recherche d’un coin de parapluie ou de paradis. Alors, donnons-leur une place, celle qui leur revient de plein droit. C’est à eux, à eux d’abord, que ce moment-culte est destiné.
  • Tous ceux qui sont là par obligation : pour faire plaisir à leur grand-mère, parce que leur éducation leur impose de respecter la tradition, parce qu’il faut faire « oeuvre de pénitence ». Le culte s’adresse à eux aussi pour leur dire que rien n’est imposé, que tout est proposé.
  • Les amateurs de musique qui viennent surtout pour la musique. Bienvenue à eux et pardon d’être trop long entre deux pièces musicales.
  • Tous les autres qui sont là et dont on ne connaîtra jamais la motivation. Vous êtes là ! N’est-ce pas merveilleux ! Merci.

Une question de vocabulaire

Tout le monde est bienvenu, et le culte devrait s’adresser à tous et toutes, ce qui suppose un gros travail dans nos formulations, nos façons d’être. Nous, pasteur.e.s et membres d’Eglises, ne sommes pas toujours au top, mais on y travaille !

Pour s’adresser au plus grand nombre, encore faut-il être audible et compréhensible. Le travail de formulation dont parle Sandrine Landeau est essentiel. Les jeunes que j’ai côtoyés ont souvent dit à propos d’un culte auquel ils avaient assisté (par obligation) : c’était long… On n’a rien compris… Et l’orgue, c’est chiant !

La formulation va au-delà des seuls mots, du seul vocabulaire. Je suis le premier à affirmer qu’il nous faut revoir, nous célébrants, nos codes. Mais, je n’ai pas encore osé, trouvé, la forme qui parlera au plus grand nombre.

La diversité des motivations et des attentes rend l’exercice encore plus difficile : comment concilier l’attente d’une paroissienne régulière qui veut une prédication profonde et inspirée avec le besoin de ce jeune homme qui vient à un culte pour la (presque) première fois sans en connaître tous les codes ?

Car, avouons-le, nos cultes obéissent à des codes, des règles, des impératifs qui ne parlent plus à la majorité de nos contemporains, paroissiens compris. Peut-être que les actes ecclésiastiques (baptêmes, mariages et enterrements) permettent une plus grande liberté, quoique, l’exercice n’en est pas moins complexe.

C’est quand ? Maintenant !

Les temples ont rouverts, mais on trouve toujours d’autres formes de cultes pour celles et ceux qui ne peuvent ou ne veulent pas s’y rendre, que ce soit juste pour ce dimanche, ou pour plus que cela.

Le culte est un temps à part dans la semaine. Un moment pour soi, pour les autres et pour Dieu. Et ce temps peut être n’importe quand. Les célébrations dans les institutions ont lieu en semaine. Il y a des cultes le samedi soir ou à d’autres heures que le dimanche matin à 10h00. Là non plus, rien n’est figé, tout est proposé. La radio, la télévion, internet offrent la possibilité de repasser le culte à l’heure qui nous convient, là où on est disponible, à l’écoute, ouvert à ce qui se passera.

En un mot, et pour conclure : le culte est une invitation à se mettre à l’écoute de Dieu et de sa Parole pour mieux se connaître soi-même. Ce temps peut être vécu communautairement et/ou personnellement, dans un temple, à la maison, dans la nature, à côté de sa radio ou devant sa télévision ou ailleurs, là où c’est bon et beau.

Le culte a été fait pour l’homme et non l’homme pour le culte.

Dieu n’impose rien. Il invite. Il ne force pas. Il attend. Il saura nous trouver que nous soyons sagement assis sur un banc d’église ou en chemin quelque part. Il est avec nous. L’essentiel est là. Tout le reste n’est que garniture.

Image par Dimitris Vetsikas de Pixabay

Cherchez l’intrus

Livre de la Genèse au premier chapitre :

Au commencement Dieu créa les cieux et la terre. La terre était sans forme et vide, et l’obscurité couvrait la surface de l’abîme. Le souffle de Dieu planait à la surface des eaux. Alors Dieu dit : « Que la lumière paraisse ! » et la lumière parut. Dieu vit que la lumière était une bonne chose, et il sépara la lumière de l’obscurité. Dieu nomma la lumière jour et l’obscurité nuit. Le soir vint, puis le matin ; ce fut la première journée (…)

Dieu dit alors : « Que la terre fasse pousser de la végétation : des plantes produisant leur semence, et des arbres fruitiers dont chaque espèce porte ses propres graines ! » Et il en fut ainsi. La terre fit pousser de la végétation : des plantes produisant leur semence espèce par espèce, et des arbres dont chaque variété porte des fruits avec pépins ou noyaux. Dieu vit que c’était une bonne chose. Le soir vint, puis le matin ; ce fut la troisième journée.

 

Évangile selon Matthieu 13, 24-30 :

Jésus leur raconta une autre parabole : « Le royaume des cieux ressemble à quelqu’un qui avait semé de la bonne semence dans son champ. Une nuit, pendant que tout le monde dormait, son ennemi vint semer de la mauvaise herbe parmi le blé et s’en alla. Lorsque l’herbe poussa et que les épis se formèrent, la mauvaise herbe apparut aussi. Les serviteurs du maître de maison vinrent lui dire : “Maître, n’as-tu pas semé de la bonne semence dans ton champ ? d’où vient donc cette mauvaise herbe ?” Il leur répondit : “C’est un ennemi qui a fait cela.” Les serviteurs lui demandèrent : “Veux-tu que nous allions enlever la mauvaise herbe ?” “Non, répondit-il, car en l’enlevant vous risqueriez d’arracher aussi le blé. Laissez-les pousser ensemble jusqu’à la moisson et, à ce moment-là, je dirai aux moissonneurs : Enlevez d’abord la mauvaise herbe et liez-la en bottes pour la brûler, puis vous rentrerez le blé dans mon grenier.” »

Prédication

Vous avez certainement déjà joué à ce jeu, seul ou en famille : « Cherchez l’intrus ». Dans une image, parmi des objets ou dans une liste de mots, il y en a toujours un qui n’a rien à y faire.

Jouons un peu à chercher l’intrus

Par exemple, si je vous dis : Rose, Jacinthe, Capucine, Coquelicot et Marguerite. Cherchez l’intrus !

C’est Coquelicot, parce que les autres sont à la fois des noms de fleurs, et aussi des prénoms féminins.

Évoquer le Royaume des cieux, ici et maintenant déjà, c’est jouer à « cherchez l’intrus ». Parce que, avouons-le, en regardant le monde, ce qui s’y passe, ce Royaume tient plus de l’espoir en un monde meilleur, voire d’une vue de l’esprit, que d’une réalité déjà concrète. Évoquer le Royaume des cieux, c’est parler de quelque chose qui n’a pas vraiment sa place dans notre monde… Ou pas encore dira-t-on. On l’imagine aisément pour plus tard, pour beaucoup plus tard.

Alors à quelle autre image recourir que celle d’une semence, d’un semeur pour dire que ce quelque chose, ce Royaume, est déjà sans pour autant être visible ? La graine plantée en terre devient invisible à nos yeux, mais se transforme jusqu’à voir les premiers signes de germination. En attendant, on se demande si elle s’est développée ou si elle a séché. Il faut faire preuve de patience. Une patience confiante qui affirme que l’essentiel est invisible pour les yeux. Et pourtant cet essentiel se passe là, sous nos yeux. On l’a tous expérimenté au moins une fois.

Ce n’est donc pas un hasard si, dans cette parabole, Jésus recourt à l’image d’un semeur confiant que ses semences donneront des épis, mais … cherchez l’intrus. C’est l’ivraie parmi la bonne semence.

Et cela me fait penser aux coquelicots dans les champs de blé. Ils se mélangent aux épis. En grande quantité, ils polluent le champ et la farine, ils deviennent alors synonymes alors de mauvais rendement. Même s’il est beau et éphémère, les cultivateur considèrent le coquelicot comme une mauvaise herbe très prolifique.

Les cultivateurs vous le diront : il n’est pas toujours facile de séparer la bonne tige de la mauvaise, surtout au début, car à vouloir trop arracher, on finit par tout arracher.

Alors, Jésus, en jardinier avisé, conseille de laisser pousser toutes les plantes et, à la fin, à la fin seulement, des moissonneurs, ceux qui ont l’œil, sauront trier, garder le blé et jeter ce qui doit l’être.

Un processus en marche

Cette parabole n’est pas une référence à Monsieur Jardinier, évidemment. Elle nous parle du Royaume des cieux, c’est-à-dire du règne de Dieu. Et ce que dit Jésus, c’est que ce Royaume est déjà semé et qu’il croît. Il n’est pas seulement à attendre ni à espérer à l’horizon de l’éternité. Il est là, sous nos yeux, sous nos pieds. Ce Royaume est un processus, un mouvement. Il n’est ni ce quelqu’un, ni la semence, ni le champ seulement, mais l’action de quelqu’un qui a semé dans son champ de la bonne semence.

Le Royaume n’est ni figé, ni statique ; il est mouvement. Et nous participons, nous ouvriers, nous serviteurs, nous humains, à ce mouvement aujourd’hui et maintenant déjà. Dieu n’agit pas sans nous, mais avec nous. Dieu est ce quelqu’un qui a ensemencé son champ, celui du monde, de sa création :

Au commencement, Dieu sème une parole féconde et laisse le temps à l’action : Il y eut un soir… Il y eut un matin… Dieu dit et, peu à peu, le monde se couvre de de verdure, les graines donnent des plantes, des épis, des fleurs, des arbres.

Dieu ne réalise pas une maquette où les arbres sont en plastique, l’herbe synthétique et les montagnes en papier mâché. Dieu crée un espace de vie… vivant et en constante évolution qui a besoin de temps et de patience. Le recours à l’image du jardin n’est pas anodin et plutôt bien trouvé pour dire l’action, le partenariat, la collaboration de Dieu avec l’humain.

Mais, sus est aussi très réaliste : il sait bien que la vie est faites de relations et que dans toute relation, il y a aussi un intrus : des graines indésirables, qui n’ont pas été voulues par le Créateur des commencements. Ça arrive même dans les meilleurs terreaux, même dans les meilleures familles, même dans les meilleures Églises.

Ces graines-là ne sont pas voulues par le Créateur. C’est important de le rappeler : Dieu ne sème pas le mal. Il ne le veut pas ni pour nous apprendre quelque chose ni pour tester notre confiance, encore moins pour nous punir de notre « mal-croire ».

Alors, cette parabole pose la question de la présence de ce qui vient perturber cet équilibre sur lequel nous tentons de vivre, entre bonnes semences et mauvaises herbes. Cet équilibre, souvent fragile, entre ce qui fait du bien et ce qui fait du mal.

Zizanie et ivraie… Tout ce qu’on ne veut pas… mais qui est là

Ainsi, dans notre monde, comme dans nos relations, ces graines indésirables, c’est tout ce qui fait croître la discorde, la zizanie. Zizanie, c’est d’ailleurs l’autre nom de l’ivraie. L’ivraie, cette plante qui rend ivre. Ivre de pouvoir, de jalousie, ivre de colère…

Ces semences-là sont semées de nuit nous dit la parabole, c’est-à-dire à l’insu de notre plein gré, quand nous sommes endormis, quand nous n’y prenons pas garde, quand nous relâchons notre vigilance.

Elles sont le fait de notre humanité, de nos limites et faiblesses, parce que nous ne sommes pas Dieu. Seul Dieu est saint et parfait.

Nous sommes, à l’image du champ, en devenir, en croissance, un espace de vie.

La distinction dans nos relations entre ce qui porte la vie et ce qui porte la mort, n’est pas toujours facile à faire. Qu’est-ce qui fait du bien ? Du mal ? Tout est si enchevêtré. Mais, un jour, au jour de la moisson, au jour de Dieu, nous verrons parfaitement, nous serons alors débarrasser de tout ce qui nous empêche de n’être que OUI à Dieu.

En attendant, cherchons l’intrus dans nos relations, nos actions, dans notre monde et plutôt que de vouloir l’arracher à tout prix, laissons-le. Ne culpabilisons pas de mal faire, de ne pas faire aussi bien que nous l’espérions, de mal croire. Ne nous renions pas nous-mêmes au risque de détruire ce qu’il y a de beau et de bon en chacun de nous, ce que nous faisons et partageons et qui est porteur de vie.

Œuvrons, à notre tour et avec nos forces, aux semailles du Royaume, là où nous le pouvons. Sans nous lasser. Pour le reste, laissons Dieu agir.

Nous serons sans doute tour à tour épis de blés ou coquelicots. Bonnes semences ou mauvaises herbes. Qu’importe… C’est humain. Nous le savons bien. Et Dieu, lui aussi, le sait. Il nous fait confiance, il nous engage à son service. Il croit en nous. Jamais il ne se lasse.

Semons des graines de bienveillance, d’amitié, de solidarité, de fraternité, de respect. Nous en sèmerons certainement d’autres aussi, de celles dont nous ne sommes pas très fiers. Mais, qu’importe. Dieu qui voit tout, saura reconnaître la vie en nous. Il ne garde et ne gardera que le meilleur en chacun de nous pour le mettre dans son grenier, là où rien ne se perd. Le reste, tout le reste, il le jettera. Lui sait.

Il ne cessera de faire grandir la vie en nous et donnera d’en vivre alors pleinement. Ce n’est pas qu’une vaine promesse. Car demain est déjà semé aujourd’hui !

Amen.

Diaconie et bénévolat

Les engagements bénévoles sont nombreux et variés dans la société. Il y a ceux dans des associations sportives, caritatives, dans des partis politiques, des causes civiques et d’autres encore.

Ces engagements volontaires ne sont pas moins variés en Église : catéchèse, accompagnements divers, visites, service au culte, événements, activités régulières, manifestations et d’autres encore.

Des hommes et des femmes au service des autres

Le bénévolat, un service diaconal

Un service diaconal, c’est une lapalissade ! Mais ça dit bien ce que revêt cet engagement : animer, donner de la vie aux relations, forcément multiples, au nom de l’Évangile. Et cela dans la gratuité.

Des hommes et des femmes s’engagent, souvent sans compter, auprès de celles et ceux qui sont dans la paroisse, mais bien plus souvent encore en marge de la vie d’Église : des résidents d’EMS, des migrants, des détenus, la population en général, des voyageurs de passage et tant d’autres, souvent invisibles, parfois oubliés des Églises elles-mêmes.

Qui ne voit-on plus ?

Plus que de la bonne volonté

Il fut un temps, pas si éloigné que cela, où le bénévolat reposait sur la bonne volonté. Il suffisait de vouloir pour pouvoir.

Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. En Église comme ailleurs, le bénévolat se professionnalise. Les « employeurs » proposent des formations, des suivis. Il y a des chartes qui fixent le cadre d’engagement, des contrats qui régissent les devoirs et obligations.

Ceci a une justification : reconnaître l’engagement bénévole comme expérience professionnelle, le valoriser dans un CV, le faire valoir dans une recherche d’emploi.

Un diplôme, et après ?
Car le bénévolat, ce n’est pas seulement l’affaire de retraité.e.s. Pensons notamment aux jeunes animateurs de camps de catéchisme, les JACS.

Une constante évolution

Le bénévolat évolue avec les publics auxquels il s’adresse. Les enjeux des engagements bénévoles ne cessent de se complexifier. J’en relève deux qui me paraissent significatifs : la visite auprès de résidents âgés, avec les questions liées au choix de mourir. L’accompagnement des migrants avec des parcours de vie souvent tragiques.

Quel horizon ?
Dans ces deux cas, qui est suffisamment préparé à accueillir et à accompagner de telles situations ? Les professionnel.les ne le sont pas toujours, eux non plus. Les diacres pas plus que les bénévoles. Mais un.e bénévole, ou un.e ministre par son expérience, par son parcours personnel, sera parfaitement à sa place dans une situation donnée. Un.e autre ailleurs.

Avant d’être un cas d’école, chaque situation est un cas de vie. Et chacun.e l’aborde avec qui il.elle est.

C’est pourquoi, les bénévoles peuvent bénéficier d’offres de suivis, sous la forme d’échange, d’étude de cas, de supervisions, d’analyse de pratique. Et l’équipe peut devenir une ressource.

Une place pour chacun, tous pour un

Aujourd’hui, le travail en équipe est une réalité dans beaucoup d’engagements professionnels et bénévoles. Ces équipes sont placées sous la responsabilité d’un.e professionnel.le, pasteur, diacre ou laïc d’ailleurs. Si ce dernier garde une implication sur le terrain (c’est vivement recommandé), il.elle a aussi un rôle plus stratégique dans l’engagement et le suivi des bénévoles.

Cette responsabilité diaconale, indépendamment de qui l’occupe, consiste à mettre en place des conditions favorables pour que les bénévoles se sentent soutenus et motivés dans leurs activités. En un mot, à rendre l’engagement vivant.
Il y a encore une dimension d’autorité. À ne pas confondre avec l’autoritarisme qui ferait passer le.la responsable pour un petit chef. Faire preuve d’autorité, c’est donner au bénévole l’espace nécessaire pour qu’il soit et devienne qui il est. Ce qui implique une bonne dose de confiance.

Il s’agit bien d’une question de rôle.

Il est évident que le bénévole n’est pas le serviteur du responsable. S’il est serviteur, ce ne peut être que du Christ, lui-même serviteur.

Un esprit d'équipe
 

Tous diacres, alors…

Je le crois profondément. Si le sacerdoce universel affirme : « Tous prêtres », je suis convaincu qu’il y a un autre engagement tout aussi universel, à la portée de tous et pour tous. Un engagement qui repose d’abord sur une humanité partagée et sur la confiance que chacun.e est aimé.e pour qui il.elle est. C’est engagement porte le doux nom de diaconie.

Que l’Église ne l’oublie pas.

Diaconie dans l’espace numérique

Si la diaconie a sa légitimé dans l’espace public et, en particulier, dans des lieux où se rencontrent les gens, alors, elle est aussi à sa place dans l’espace numérique qui est une dimension particulière du fait de se rencontrer.

Des liens par écran interposés
Ce que j’appelle espace numérique, c’est internet, les réseaux sociaux, les blogs, les sites personnels et institutionnels des Églises, des communautés et d’autres professionnels.

J’ai hésité à parler d’espace virtuel, mais le web est bien réel et animé par des blogueurs et visiteurs bien vivants et réels, eux aussi. J’en reste donc à la dénomination d’espace numérique.

À titre personnel, je regrette qu’il y ait encore trop peu d’initiatives émanant de non-professionnels, de bénévoles par exemple, dans cet espace numérique.

Un réseau-protestant

Depuis quelques mois, un Réseau-Protestant se met en place. Il a pour vocation de tenir à jour une liste de références du web protestant en Suisse romande et de mettre en relation ces sites et ces blogs afin de constituer et d’animer un un vrai réseau. Ainsi il devient possible et pertinent de rendre visible cette présence sur internet. Ce qui me paraît rejoindre une vocation diaconale.

Un réseau pour mettre en lien

En quoi est-ce diaconal, au fait ?

Vous penserez peut-être, au passage, que je vois de la diaconie partout ou que, selon moi, tout est diaconie. Non, évidemment ! Et pourtant… Je reviens à la définition de la diaconie comme je la conçois : celle de l’animation, le fait de donner ou redonner de la vie, de se sentir vivant et en relation les uns aux autres. Alors, dans cet esprit, ce Réseau-Protestant a bel et bien une portée diaconale.

En parcourant la liste du Réseau-Protestant, je constate d’abord que celle-ci propose des portes d’entrée et rejoint les internautes là où ils se trouvent, là où ils cherchent. Ensuite, elle présente la vie d’un réseau constitué d’hommes et de femmes engagés.

Mais surtout, ces sites et des blogs, et c’est là que la diaconie prend tout son sens, sortent des quatre murs des Églises pour aller à la rencontre, en publiant des contenus qui répondent à des attentes variées : on y trouve, outre des informations institutionnelles, des prédications, des réflexions personnelles et professionnelles, des réponses à des questions.

Le langage et la forme propres à chaque auteur sortent, eux aussi, de la liturgie ou du langage des célébrations. Et c’est ce qui fait la beauté, la pertinence et la diversité de ce Réseau.

Être là où deux ou trois (et plus) sont réunis

La diaconie sur internet ? Une évidence ! Demandez-vous un instant : quand vous cherchez une information, quel est votre premier recours ? Internet, Google, votre smartphone. Comme tout le monde.

Que cherchez-vous ?
Donc, la diaconie peut (voire doit) être présente dans cet espace. Non seulement par des sites qui présentent ce qu’est la diaconie de manière officielle : le portail diaconie.ch ou l’association diaconale romande, mais aussi, et surtout dirais-je, par des témoignages, des prises de position, des réflexions à propos de la diaconie par des professionnels et, plus rarement hélas encore, par des non professionnels.

L’affaire de tous

Ce qui me permet de rappeler au passage que la diaconie n’est pas l’apanage des seuls diacres consacrés et reconnus comme tels, mais des pasteurs et théologiens, professeurs de théologie, chercheurs, bénévoles, laïcs, de vous aussi. Dès que le message s’adresse au plus grand nombre, au monde, à la société, aux politiques, c’est de la diaconie !

Dès que ce message vise à favoriser, à encourager, à initier la rencontre et donner de la vie à la vie, à la faire naître, à l’animer face-à-face ou par écrans interposés, c’est de la diaconie.

Et cela, c’est l’affaire de tous, qui que vous soyez, qui que tu sois.

Cet article pourra être complété et modifié selon vos commentaires.

Images tirées de Pixabay.com.

Diaconie dans l’espace liturgique

La diaconie n’est pas seulement un mouvement de l’Église vers l’extérieur, la société et le monde, mais est aussi constitutive de la célébration elle-même. D’ailleurs le mot liturgie signifie service du peuple et a une origine laïque. La diaconie a toute sa place dans l’espace public, mais aussi dans le cadre des célébrations et cérémonie, comme lieux et moments d’ouverture au monde.

Les célébrations dominicales

Les cultes et les messes s’adressent-ils d’abord à ceux et celles qui y assistent (plus ou moins) régulièrement ou ont-ils une portée plus large ? La célébration s’adresse évidemment au monde… et au monde entier. Il y a d’ailleurs un échange, une porte à double-battants dans la célébration : c’est le lieu et le moment de faire entrer le monde dans le déroulement et de faire sortir la proclamation en direction du monde.

Il y a des moments plus propices à la diaconie. J’en distingue trois (au moins) :

  1. Le moment de l’accueil. La bien-venue au culte ne se limite pas à quelques mots prononcés du haut de la chaire, dans les premiers instants, mais à un accueil personnel par une présence à l’entrée ou sur le seuil, par un sourire (franc et sincère), par quelques mots échangés. Ceci est d’autant plus important pour des personnes qui ne sont pas habituées. L’épidémie du COVID-19 implique des mesures, notamment la désinfection des mains et le port du masque. Au-delà d’une simple mesure sanitaire, il y a le souci de l’autre, la préservation de sa santé, la responsabilité collective et individuelle dans ce geste à valeur diaconale.
  2. Les annonces et la prière d’intercession. Selon moi, ces moments sont indissociables, car ils font entrer le monde (proche ou lointain) et ses préoccupations dans la célébration. L’assemblée est rendue attentive à ce qui se passe tout près ou plus loin, à participer à un geste collectif, celui de la remise à Dieu de cette situation, mais aussi à une mise en œuvre de ce que chacun.e peut faire pour changer les choses. La communauté pourra être, par exemple, informée et sensibilisée à une situation locale préoccupante, sollicitée pour des aides diverses, informée de l’avancement d’un projet soutenu par la paroisse.
  3. L’envoi et la bénédiction. Ils terminent la célébration, tout en envoyant les participants dans le monde, dans la vraie vie, porteurs de ce qu’ils ont reçu pendant la célébration. Je conçois la clôture d’une célébration sous la forme triviale de « C’est à nous de jouer maintenant ! » (l’envoi) et « nous ne sommes pas seuls. » (la bénédiction).

Mais, je suis aussi persuadé qu’une prédication a une vraie portée diaconale, du moment qu’elle s’enracine dans le concret et le quotidien et invite à l’action, qu’elle nous anime, redonne un esprit d’initiative à notre quotidien.

Des célébrations comme des projets

Je m’intéresse encore aux actes ecclésiastiques. Sous ce terme un peu barbare, on désigne le baptême, la bénédiction de mariage et le service funèbre. Trois célébrations particulières, parce qu’elles réunissent des cercles de participants distincts, et fort différents bien souvent, des paroissiens habituels : les familles, les amis et les proches.

La liturgie doit par conséquent tenir compte de ces auditeurs présents, en s’adaptant, en laissant aussi une place à d’autres prises de paroles que celle de l’officiant, à adopter un langage compréhensible et audible par le plus grand nombre, à renoncer à un vocabulaire obscur. Sans pour autant oublier la force de la Parole et du témoignage.

Un équilibre parfois difficile à maintenir

Lors d’actes ecclésiastiques en particulier, il y a de nombreux paramètres à faire tenir ensemble : les attentes des familles, des proches et paroissiens réguliers, leurs projections (parfois rêvées), leur méconnaissance de ce que sont de telles cérémonies, le souci de l’officiant de respecter ce qu’est cette cérémonie de tradition réformée ou catholique, les interventions et prises de paroles de tiers (quelquefois spontanées), les choix musicaux parfois discutables, la technique, la durée, les imprévus, les questions d’argent qui se posent inévitablement.

Il arrive ainsi qu’un baptême, une bénédiction de mariage ou un service funèbre s’apparentent à une véritable gestion de projet. Je le vois de manière positive, comme la manière d’accompagner des familles dans un projet, d’écouter et de répondre à des questions pertinentes et existentielles, de construire ensemble quelque chose qui a et prend du sens.

La gratuité, encore et toujours

Mais ces actes ecclésiastiques, même s’ils réunissent souvent un public plus nombreux que les célébrations dominicales, ne sont pas des occasions de faire du prosélytisme ni de convertir ceux et celles qui y participent. Au contraire, il s’agit de rejoindre dans leur joie et leur peine, les familles qui font appel à un.e représentant.e d’une Église. De nous faire sentir d’abord proches et humains, donc animés et vivants, dans un moment particulier de l’existence humaine, tout en rappelant que tout ne dépend pas de nous seuls. Et tout cela dans la gratuité et rien de plus. Tout est don.