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Ma petite boîte à outils

À la mi-mars, Philippe Golaz a publié sur son blog L’Eglise sur internet à l’heure du coronavirus. Il y présente réflexions personnelles, plate-formes, outils et matériels pour être Église autrement.

En relisant ce billet, j’ai eu envie de partager ma boîte à outils, celle du (modeste) blogueur que je suis.

Le matériel

Rien de bien extraordinaire ni d’onéreux.

L’essentiel :

  • Un carnet et un stylo (marque, modèle et format laissés à votre appréciation). C’est tout bête, mais ça ne prend pas de place et c’est utile pour écrire le début de quelque chose, la fin d’autre chose, une citation, une référence, un contact et tant d’infos pouvant se révéler utiles.
  • Un MacBook Pro. Pas besoin du dernier modèle, le mien est âgé de 7 ans environ.

Ce qui suit est optionnel :

Quelques outils

C’est une sélection de trouvailles que je teste. Juste histoire de ne pas les oublier trop vite. Ou de les oublier, en disant que je les ai testées.

Nicolas Friedli propose un Guide de démarrage rapide pour lancer son blog.

L’écriture

Mon blog

Pour la rédaction de mes billets de blog, je viens de découvrir le langage Markdown pour écrire vite et bien, sans distraction. J’utilise l’éditeur MacDown.

Connaître quelques codes simples et le tour est joué. Juste être concentré sur le contenu. La forme peut attendre, d’autant plus qu’elle s’adaptera au média : web ou document.

Cet outil me sera aussi utile dans mes rédactions futures, également pour les textes destinés à être formatés, puis imprimés souvent au format A4.

Ensuite, je copie ces textes dans WordPress qui me sert à animer mon blog.

Multimédia

J’ai ouvert un podcast chez Anchor.fm. J’y dépose mes enregistrements de méditations et prédications. Avant publication, je fais un peu de montage audio basique au moyen d’Audacity : amplifier, normaliser, couper, mixer. C’est vraiment du basique.

J’ai tenté la vidéo au moyen de QuickTime. Je n’ai pas tenu le rythme d’une vidéo par mois. Je dépose mes vidéos et celles de collègues, envoyées pour les cultes à l’emporter de la paroisse de La Neuveville, sur ma chaîne YouTube. Un montage rudimentaire à l’aide d’iMovie (sur Mac) : ajout de textes, coupures et mixage de séquences.

Flux et blogs

J’utilise Feedly comme lecteur de flux. Ainsi, je suis les blogs et contenus qui m’intéressent vraiment, sans être noyé par une avalanche de news qui ne m’intéressent pas vraiment ou si peu, et qui me sont imposés par les réseaux sociaux.

Si des articles me parlent, je les conserve dans Pocket1 en vue de ne pas les perdre.

Intéractions

Les interactions devraient se jouer sur le blog, par les commentaires des visiteurs. La plupart préfèrent aimer ou liker une publication sur Facebook sans autre forme d’interaction, soit commenter la publication sur ce même Facebook. Toutes ces marques d’intérêt se perdent, à l’image de ce qui est dit dans ce commentaire. J’encourage donc vivement la migration de commentaires à la suite de mon article. Les commentaires sont pérennes.

Une autre possibilité serait de se commenter entre blogs. Le commentaire deviendrait un article citant le blog de départ. Une manière de renforcer le maillage du réseau. C’est ce que je fais ici, en partant d’un article du blog-ami de l’ami Philippe Golaz.

Réseaux sociaux

Je suis de moins en moins convaincu par Facebook.

Je décide de faire une pause dans mes publications. C’est un choix. Je n’aurai que peu d’interactions sur ce réseau-là. Ce qui m’intéresse, je le garde dans Pocket. S’il y a possibilité de répondre à un article, dans un blog ou un site, je le fais. Sinon, je m’abstiens ou mieux,j’en fait un article sur mon blog en citant la source.

Je suis conscient que mes commentaires (parfois lofoques) laissés sur Facebook se perdront. C’est peut-être tant mieux. Sans doute qu’ils ne seront pas vraiment ni définitivement perdus.

Une publication sur ce réseau est théoriquement visible dans le flux, mais le flux est dense et ladite publication se perd très vite. Impossible de faire des recherches pertinentes, de retrouver ou rédiger des articles structurés. Je l’ai déjà expliqué.

Partage de photos.

Je partage une image personnelle par jour sur Instagram. Un titre, quelques hashtags et c’est tout ! Je pourrais aussi le faire sur mon blog, peut-être à un rythme moins soutenu, une par semaine, par quinzaine, quand je veux ?

Donc pour résumer :

Si je devais synthétiser mes choix du moment, en juin 2020, je retiendrais ceci :

  • Ma page Facebook aussi peu que possible
  • Mon Blog perso aussi souvent que nécessaire
  • L’utilisation du langage Markdown
  • Le tri dans les flux intéressants pour moi et que pour moi
  • Des archives de pages, articles à conserver et à reprendre.

Et le reste sera adapté au fur et à mesure.


  1. À voir si je garde, ou si je trouve une autre alternative. 

Passer à l’action

Mon billet Mes projections a suscité de nombreux commentaires sur Facebook surtout et sur ce blog. Ce qui a été partagé m’a montré que je ne me trompais pas et me donne suffisamment de matière pour continuer la réflexion vers sa concrétisation, enfin j’espère.

Un constat partagé

Celles et ceux qui ont pris la peine de commenter mon article et de se répondre, merci à eux, arrivent au même constat : l’Église a disparu du radar des gens. Elle n’est plus visible autrement que par des célébrations à l’envi. La crise du corona n’a rien changé, bien au contraire, puisqu’on a vu fleurir de (très) nombreuses propositions multimédias de… célébrations.

Une envie commune de changer

Ce qui ressort des réactions, c’est que le temps de « pause » n’en a pas été un. Il n’a pas été cet espace nécessaire pour nous repenser. Mais, bien au contraire pour continuer à faire ce que nous avons toujours fait, un peu différemment il est vrai, mais sur le fond, rien n’a changé : le culte reste LA priorité des paroisses, malgré un public âgé et en constante diminution. Il faut sauver les cultes !

Mais, il y a autre chose. Il y a une soif d’autre chose, surtout de la part de ceux qui ne sont pas nos habitués, qui ne nous comprennent pas.

À boire…

Des pistes

Deux pistes semblent se dessiner. La première est de l’ordre de l’intelligence collective. Il s’agirait de mettre en commun, d’une manière ou d’une autre, nos réflexions et expériences, de les soumettre à la discussion, de les confronter… « Pour voir ce qui en ressort. » Je crois que chaque Église, voire chaque paroisse, s’est déjà prêtée à l’exercice avec les résultats que l’on sait : on cogite, on réalise des schémas, des tableaux, des dessins, on aligne des post-it. Pour en arriver à : « Merci beaucoup, c’est top tout ce que vous avez fait, c’est précieux ! On va reprendre tout ça… », sauf qu’on ne reprend jamais rien !
Oui, à la mise en commun de nos expériences, initiatives et projets, parce qu’il ne sert à rien de réinventer la roue, mais non à d’énièmes journées de réflexions. Un outil informatique et collaboratif ferait-il l’affaire ? Il devrait être accessible, sans nécessiter de connaissances techniques particulières, ouvert au plus grand nombre et suffisamment adaptable. Une idée ?

Une autre piste envisagée est celle de l’initiative personnelle, et notamment sur le net, parce que c’est là que se trouvent les gens, ceux qui ne sont pas aux cultes. Pendant la crise, on a vu que nos initiatives en ligne ont suscité l’intérêt d’un public plus large que nos paroissiens. C’est là que des réponses aux questions sont trouvées.

Il y a bien les réseaux sociaux, me direz-vous. Mais être présent et/ou actif sur les seuls réseaux sociaux ne suffit pas. Partager un post ou le commenter ne suffit pas. On le sait, enfin je crois, et le « Like » ou le « J’aime » sur Facebook ne sert à rien. Toute ces interactions se perdent dans le flux et au fil du temps. Aucune possibilité de recherche, ni de rédiger de longs articles structurés. Raison pour laquelle, j’ai pris la peine de copier la plupart des commentaires de Mes projections sur mon blog. Pour en garder une trace.

Les *j'aime* ne disent rien

Il est alors plus pérenne de créer et d’animer un blog. C’est encore mieux, si ce blog est indépendant de toute structure ecclésiale ou autre. Il devient un espace d’expression et de partage libre. Ce qui n’empêcherait pas une paroisse, par exemple, d’inclure l’animation d’un blog dans un temps de travail professionnel.

Le blog est surtout l’affaire d’une personne, son auteur. Les visiteurs/lecteurs suivent une personne et non une institution. Ils interragissent avec elle et elle avec eux. Il n’y a pas de messages « officiels », car sur ce blog, celui que vous êtes en train de lire, je m’exprime en mon nom.

Témoins du web protestant ?

En m’intéressant à cette piste-là, je me suis aussi intéressé au phénomène de l’influenceur ou du lanceur d’alerte. Un blog, plus encore s’il s’inscrit dans le web protestant, aurait-il vocation à devenir lanceur d’alerte de ce qui ne va plus dans l’Église ?
Bon, on n’est pas des Julian Assange ni Edward Snowden, mais, nous (d’autres avec moi) avons des choses à dire qui viennent de nous. Ce que nous disons, ce n’est pas relayer le discours officiel des institutions. D’autant plus que nous y travaillons. Nous voyons et vivons les choses de l’intérieur.

Je n’ai ni envie d’être ni un accusateur ni un traître de l’institution Église, comme pourrait l’être le lanceur d’alerte. Mais j’aimerais plutôt partager ce qui m’anime et me questionne, moi et moi d’abord. Et, sur ce blog il y a des réflexions, des contenus spirituels, des partages d’expériences que je crois utiles à d’autres. Alors, le mot qui me qualifie, et faute de mieux, est témoin, ni plus ni moins.

Regarder tout autour et le relayer

Juste dire ma vérité, ni plus ni moins. Vérité teintée par celles d’autres, et souvent par celle des distancés, comme on qualifie parfois ceux qui se sont éloignés des activités et du message de l’Église. Par celle aussi des athées, souvent motivante. Vérité qui peut être mise en discussion, évidemment. C’est d’ailleurs l’un des objectifs de mon blog.

Et maintenant, on fait quoi ?

Il est l’heure ! L’heure de se réveiller, l’heure d’agir. L’heure de passer du constat, des mots et des regrets aux actes. Et on fait quoi ? On fait comment ?

C’est certainement ici que le Réseau-Protestant devient intéressant, essentiel dans cette évolution vers un changement.
C’est une liste de références qui ne demande qu’à s’étoffer. Des ressources et blogs en lien avec le protestantisme romand. Au chapitre des blogs, on y trouve des pasteur.e.s, théologiens, diacres (encore peu nombreux, l’appel est lancé) qui s’expriment de diverses manières sur ce qui les anime. Oui, sur ce qui donne du sens à ce qu’ils font, à ce qu’ils sont.

Et on fait comment ?

Vous êtes convaincus ? Vous avez des choses à dire et vous voulez les partager au moyen d’un blog ? Vous avez envie de me/nous rejoindre ? Bravo !
Mais, vous ne savez pas comment vous y prendre. Il y a de très bons conseils sur theologique.ch. Et les blogueurs sont là aussi pour vous aider, tant sur l’aspect technique que sur la mise en route. La forme et le fond vous appartiennent.

Se lancer dans un blog n'a rien de sorcier

Et à part le Web ?

Il y a certainement d’autres moyens, d’autres occasions à créer, d’autres initiatives à lancer. Mais, dans un cadre paroissial et institutionnel, je perçois des limites. D’abord, la marge de manœuvre que le conseil/l’autorité voudra bien donner à de nouveaux projets, sans se focaliser uniquement sur des questions de coûts et de rentabilité. Parce que, avouons-le, tout projet impliquera du temps de travail qui ne sera plus dévolu aux seuls cultes. Ensuite, le risque que je suis prêt à prendre pour oser être innovant. J’avoue que j’ai longtemps fonctionné sur le principe de je propose avant de me lancer, j’attends tous les feux verts et quand certains sont au rouge ou à l’orange, je range mon idée. Il est sans doute temps de risquer l’excès de zèle, d’expérimenter l’audace.

« Venez à ma suite », a dit Jésus à deux pêcheurs qui ne lui demandaient rien, qui ne le connaissaient même pas. Et aussitôt, ils le suivirent.
Il est temps. Il est grand temps !

On lira avec intérêt l’interview de Thomas Halik, l’église doit être là pour tous, pas uniquement pour les croyants.

[Cet article est susceptible d’être modifié par vis commentaires]

 

Images Pixabay.com

Mes projections

Je ne parle pas ici de celles qui s’échappent de ma bouche lorsque je parle, mais celles que je me faisais au mois de mars, la mienne, celle de La Margelle et celle de ma paroisse au début et pendant la crise.
C’est peut-être un peu tôt pour faire un bilan. Quoique…

Le besoin de parler

Je pensais, lorsque les mesures de confinement ont été annoncées, que La Margelle, lieu d’écoute et d’accompagnement en Ville de Neuchâtel, serait sollicité par ceux et celles qui se trouveraient « coincés » à la maison, en proie à la solitude, ressentant un besoin quasi irrepressible de parler. J’imaginais une augmentation des appels. Or, il n’en a rien été. Nous n’avons pas croulé sous les nouvelles demandes.

La même démarche a été entreprise dans notre paroisse, comme dans les autres et les Églises cantonales, notamment l’EREN.

Le constat a été le même : nous n’avons pas été sollicités outre mesure. Qu’est-ce à dire ? Ce besoin de parler et d’être écouté était-il une projection de ma part ? Pourtant, mes initiatives de prendre des nouvelles ont été accueillies très positivement. Ces discussions ont été l’occasion de dire comment chacun vivait son confinement, plus ou moins bien, dire son ennui.

Le besoin d’écoute était bel et bien présent, je l’ai constaté. Et La Main Tendue a enregistré une forte hausse des appels à tel point qu’elle a dû engager de nouveaux bénévoles. Alors pourquoi les gens qui auraient besoin d’écoute ne se tournent-ils pas vers l’Église et ses services ?

Ma conclusion relative et personnelle : les Églises, paroisses et lieux d’accompagnement ne sont pas considérés d’abord comme des aides potentielles en cas de crise. La sécularisation a passé par là. Est-ce qu’on s’imagine que ces lieux ne sont là que pour ceux qui sont inscrits ou qui font partie du « club » ? Est-ce qu’on y recourt parce qu’on connaît quelqu’un qui y est actif ? Ce serait donc soit un lieu « élitiste », soit et d’abord une relation de personne à personne, avant d’être un recours à l’institution ? Ce n’est pas impossible, voire probable.

Un autre aspect non-négligeable est qu’en investissant quasi exclusivement dans la célébration, les Églises ont donné le signal, consciemment ou non, que L’Église, c’est pour les autres, pas pour ceux qui ne sont pas très cultes et qui ne se reconnaissent pas dans la célébration. Ainsi, on a oublié que l’Église pouvait ou devait être autre chose.

Un dernier aspect pourrait être la crainte de discours parfois culpabilisants à propos de la crise.

Le rôle social vs la célébration

Cela ne signifie pas pour autant que les Églises aient déserté la crise. Elles ont été actives mais par les œuvres d’entraide : CSP, EPER, CARITAS aux côtés d’autres institutions et associations religieuses et sociales.

Du côté de la paroisse, nous étions prêts à entrer en discussion pour des aides financières ou matérielles ponctuelles. Nous nous sommes approchés des services sociaux pour faire connaître notre ouverture. Sans résultat.

Il me semble (suis-je le seul ?) qu’on a oublié que l’Église compte parmi les acteurs sociaux, non seulement par les institutions parallèles (oeuvres d’entraide), mais surtout dans une dimension de proximité dans l’espace paroissial, local, régional.

Nous avons manifesté notre soutien et notre disponibilité par des téléphones et des publications destinés d’abord aux paroissiens âgés, ceux que nous connaissons.

Les médias ont relayé des images d’une précarité qui est soudainement apparue. Des files d’attente pour obtenir un cabas de nourriture nous ont tous bouleversés. Mais, ce qui m’a interpellé encore plus, c’est le silence et l’absence des représentants des Églises face à ce vrai problème de société. Il n’y a pas eu de prise de parole en lien avec cette pauvreté soudainement offerte à nos yeux.

J’ai plus entendu un appel au Conseil fédéral, appel issu d’abord des catholiques, de pouvoir reprendre les offices religieux. Mais, je n’ai pas entendu une même ferveur, un même empressement, pour venir en aide aux précarisés de notre société. Je pensais, j’espérais que la pauvreté matérielle et sociale était tout aussi importante que des célébrations. Je me trompais.

Ma conclusion relative et personnelle : les Églises sont perçues d’abord dans leur dimension liturgique. De leur côté, elles mettent en avant la célébration, comme seule forme de présence au monde. On l’a constaté dans tout ce qui a été développé sur internet pour rester en lien malgré l’absence de rassemblement. Je ne jette la pierre à personne, puisque nous l’avons fait, nous aussi.

La capacité à changer

La crise du COVID-19 va-t-elle changer quelque chose à la donne ? Cet arrêt sur image nous a contraints à revoir nos habitudes, notre manière de travailler et de fonctionner, à prendre conscience de ce qui vraiment important. On s’était promis de ne plus revenir au monde d’avant. On s’était dit…

Et alors ?

Dès que des mesures d’assouplissement ont été annoncées, on a vu des groupes se former à nouveau, on a demandé plus que ce que les autorités permettaient. On a parfois enfreint les règles. L’humain est un animal grégaire… Ou n’est pas.

À l’annonce d’une possible reprise des offices religieux dès le 28 mai, j’ai constaté des appels à « reprendre aussi vite que possible ». Sans forcément se demander comment. On a vite oublié le « aussi lentement que nécessaire » qui allait avec. « Nous d’abord » en quelque sorte1. Il ne s’agit pas seulement des aspects pratiques : nombre de places, désinfection des mains et liste de présence, mais de considérer cette reprise comme un nouveau départ, comme une réponse à des questions fondamentales soulevées par la crise du COVID-19 : notre rappport à la société en-dehors des rendez-vous communautaires, notre ouverture à ceux qu’on ne voit jamais dans nos rassemblements, notre manière d’être en lien au-delà des seuls rendez-vous dominicaux.

Au lieu de cela, on pense d’abord à un retour à avant, un retour à la normale, comme si le monde était redevenu normal, comme si rien n’avait changé. Ce que nous avons vécu serait donc juste une parenthèse, refermée maintenant et qu’on va vite oublier. Ça relève peut-être de l’anecdote, mais, dans la paroisse, on a repris le programme des cultes là où on l’avait laissé en mars, sans se poser la question de changements notoires. On continue…

Alors, où sont nos belles promesses ? Où est notre témoignage, personnel et communautaire, qu’un autre monde est possible. La possiblité nous est offerte de ne pas retomber dans nos ornières et on y court à grands pas. Parce que c’est rassurant. Je pensais, j’espérais que toutes ces plaintes d’une pression professionnelle insupportable, d’une course à toujours plus, d’une perte de repères trouveraient un écho pendant ces deux mois, pour repartir autrement. Je me trompais.

Ma conclusion relative et personnelle : nous n’aimons pas les changements et encore moins lorsqu’ils sont radicaux. Nous avons besoin de routines qui rassurent. Même si, au plus fort de la crise, nous étions prêts à tout revoir de nos comportements, avec des belles promesses à la clé, la progressive réouverture nous montre que nous ne sommes pas prêts à renoncer. Entre pression économique, sécurité sanitaire et idéalisme social, les autorités et nous avec naviguons à vue. Je pensais, j’espérais qu’une interruption des célébrations serait l’occasion de les penser d’une autre manière dorénavant, qu’il y aurait une envie de nouveauté, un renouveau possible. Je me trompais.

Autre chose… Oui, mais quoi ? Je ne sais pas, pas encore, je l’avoue.

En prenant un peu de hauteur, à l’image de Zachée2, je trouve que le jeune homme riche nous ressemble beaucoup ou que nous lui ressemblons beaucoup, c’est selon : « il s’en alla tout triste, car il avait de grands biens… (qu’il n’était pas encore prêt à laisser derrière lui) »3. Et nous, quels sont ces grands biens que nous n’abandonnerions pour rien au monde… même pas pour un autre monde, peut-être pas meilleur, mais différent ?

[Cet article pourra être modifié au gré de vos commentaires]

Je vous invite à lire cet article signé Pinkilla.

 

Photo mise en avant by Yann Allegre on Unsplash, autres photos : Pixabay

 

Ça recommence

Tout est dans la manière de prononcer ces mots.

ENFIN ! qui traduit toute l’impatience de retrouver ceux qu’on n’a plus vus depuis tout ce temps, des lieux familiers qui nous font nous sentir « comme à la maison » et des habitudes qui rassurent.

ENCORE ! qui laisse entendre un profond soupir quand votre voisin se met à passer la tondeuse, alors que vous vous installez confortablement dans votre jardin pour lire ce billet.

« Ça recommence. » Pour nos Églises aussi, ça recommence : le Conseil fédéral a annoncé la possibilité de reprendre les offices religieux dès le 28 mai prochain (un jeudi, allez savoir pourquoi). Et tout se précipite. J’ai vite pris conscience d’une tension entre « C’est urgent de recommencer, on est impatient de se revoir enfin. » et « Prenons le temps de bien mettre en place les mesures et réfléchissons à comment on va recommencer. »

Parce que nous avions fixé l’horizon du 8 juin comme date de reprise. Nous avons imaginé des cultes particuliers et spéciaux pour Pentecôte, s’attendant à les vivre encore à distance. Et voilà que tout change, que tout s’accélère. Tant mieux d’un côté. Mais tant pis de l’autre. Vraiment ? Renoncera-t-on à ce qu’on a préparé ou devrons-nous l’adapter, comptant sur une assemblée présente plus ou moins nombreuse ?

Je suis partisan de la « méthode Berset » :

il nous faut reprendre les cultes aussi vite que possible, mais aussi lentement que nécessaire.

Il n’a pas fallu très longtemps pour oublier nos belles promesses de ne plus courir après le temps, de ne plus stresser, d’adopter un rythme plus lent, plus sain.

Une annonce et voilà que tout est oublié, ou presque.

« Ça recommence » dirons-nous : on devra se désinfecter les mains en entrant et en sortant, on devra tenir une liste des présences, on devra renoncer aux cantiques et à la sainte-cène, on devra se prêter à de savantes règles de trois pour déterminer le nombre maximum de participants. Comme juste avant le confinement.

Dans ces conditions, le « culte de rentrée » aura-t-il les couleurs d’une fête ?

Et pourra-t-on dire tous ensemble la confession de foi, sans risque de contaminer son voisin ? Et l’Amen, on pourra aussi le prononcer ? Notre manière de nous accueillir, de célébrer, nos mots seront forcément différents d’avant le 15 mars.

Nous ne pourrons pas simplement reprendre là où nous nous sommes arrêtés. Enfin, je crois.

Nous sommes plusieurs à nous demander ce que nous garderons de notre créativité durant ces semaines de crise. Comment rester en lien avec celles et ceux qui nous ont rejoints et suivis sur nos sites paroissiaux. Ils ont été nombreux. On ne les connaissait pas tous. Va-t-on tout remiser cela au fond d’un tiroir jusqu’à la prochaine crise ? Comment préparer et célébrer des cultes qui tiendront compte de ceux qui sont présents à l’église et de ceux qui resteront chez eux ? Filmer, enregistrer, publier le culte ? Comment concilier paroisse proche et à distance ?

Autant de questions qui sont aujourd’hui des chantiers ouverts à explorer par les ministres, les conseils et les bénévoles, et qui exigent un peu de temps, pour le moins.

Comme ce fut le cas des premières communautés chrétiennes, il s’agira désormais de compter avec le facteur temps : penser une autre manière d’être ensemble.

Alors, je vous laisse avec cette parole de l’Évangile de Matthieu adaptée à la situation et à relire aussi souvent que nécessaire :

Avant de reprendre les cultes, retire-toi dans ta chambre, ferme la porte. Ton Père qui est dans le secret voit et sait de quoi tu as besoin… Puis sors et va boire une bière.

Je vous laisse. Ne roulez pas trop vite ni trop lentement pour vous rendre au culte… au Nord-Pas-de-Calais ou ailleurs.

Images tirées de pixabay.com et Youtube.

Une question piège

Il y a quelques jours, j’ai lancé cette question en vue de la rédaction de cet article :

Que pourrait être un diacre ?

Les réponses ont été variées, mais surtout, elles m’ont (dé)montré que si la question dérangeait, elle n’en était pas moins importante. Mais elle est piégeante, voire piégée.

En effet, soit elle renvoie à une définition par trop généraliste du portrait diaconal tel qu’il est défini par l’office qui le forme, soit elle m’entraîne sur le terrain glissant de la Dispute ecclésiologique, tant les compréhensions sont plurielles.

Alors, j’aurais pu refermer la question, et j’y ai pensé, et passer à autre chose. Ou, reprendre les quelques pistes de réponses reçues en commentaires sur Facebook. C’est ce que je fais ici. Surtout que sur ce blog, je peux m’exprimer en mon nom.

Merci au passage à ceux et celles qui ont pris la peine de participer à la discussion.

Donc voici, ce que pourrait être un diacre :

1. Décomplexé

Voilà qui met le doigt sur ma manière de me définir et de me présenter comme diacre. Je souffre, quand même et malgré tout, d’un complexe d’infériorité par rapport à la figure du pasteur. Même si, la plupart de ceux et celles que j’ai rencontrés ne me l’ont jamais fait sentir. Ça doit être une question de confiance en soi.

Il y a peu, un collègue catholique me demandait si, en tant que diacre, j’étais subordonné au pasteur, s’il était mon chef. Non, lui et moi, sommes sur un pied d’égalité, au moins en théorie. Ça tient à la structure différente de nos Églises catholique et réformée. Mais, j’ai parfois ce sentiment que lui en sait plus que moi et qu’il pourrait me le faire remarquer. C’est sans doute vrai. Mais lui, pourrait bien penser la même chose de moi.

2. Parfait

Voilà qui me plaît, car je suis parfait !

Mais non, je plaisante. Vous connaissez certainement la boutade : « Le Parfait n’existe qu’en tube ! » Note pour mes lecteurs non-suisses : Le Parfait est une pâte à tartiner à base de foie.

Mais si je comprends « parfait » au sens biblique d' »accompli », alors je me considère toujours en voie d’accomplissement. Je ne recherche pas la perfection, qui n’est pas de ce monde, mais j’aspire à cet horizon de l’accomplissement, d’une manière de devenir qui je suis, sans complexes. Et ce qui fait le coeur de mon engagement, la rencontre, me permet de viser cette horizon.

3. Humain

C’est tellement évident que je n’y avais pas pensé. Mais, toutes mes expériences m’ont conduit à vivre l’humanité au plus près, à l’accompagner jusqu’à son terme, à cheminer et à être bousculé par des questions qui se posent justement quand on touche à cette frontière entre vie et mort.

J’ai été amené à visiter la mienne d’humanité en particulier. Être humain, c’est certainement le meilleur moyen d’être parfait, reconnaissant mes limites, mes forces, mes faiblesses, mon potentiel, mes qualités et mes défauts.

4. Heureux

Être heureux, c’est bien plus qu’éprouver de la joie. J’aime beaucoup la traduction des Béatitudes par André Chouraqui : il remplace « Heureux » par « En marche ». Cela me parle, car un diacre est en mouvement, il évolue, il progresse, il s’accomplit. Il devient de plus en plus, et sans doute de mieux en mieux, lui-même. Et un pasteur ? me direz-vous. Aussi sans doute.

Heureux, c’est être bien dans ses baskets, à l’aise dans mes engagements, avec un grain de créativité et de folie, parfois ou souvent bridées par l’institution ou les besoins à combler. Car tout le monde comprendra qu’il est plus urgent d’assurer un culte dominical plutôt que d’esquisser les contours d’un projet de lieu d’écoute qui peut facilement être reporté à (beaucoup) plus tard.

5. Dérangeant

Un grain de sable dans les rouages. Un caillou dans la chaussure. Une écharde dans la chair (pour reprendre des propos de Jean-Jacques Beljean dans la revue Itinéraires n°82 de 2013). Voilà aussi ce que pourrait être un diacre.  Sa vocation sera celle de rappeler que l’Église n’est pas seulement faite de célébrations et que l’œcuménisme ne se manifeste pas que dans des liturgies policées. D’ailleurs, les liturgies ont une portée diaconale, puisque que la signification est « service du peuple ». L’Église avance sur deux jambes : la proclamation de la Parole et le service au prochain. Il me semble que pendant ce temps de confinement, les paroisses, et nous, avons mis beaucoup de forces et de ressources dans le cultuel. C’est bien, mais n’avons-nous pas sautillé sur un pied ?

Le diacre amène le monde. Ne comprenez pas qu’il devrait remplir les temples et églises, mais il rappelle que la paroisse a le souci de s’ouvrir au monde environnant plutôt que de se refermer sur elle-même et sauver ses membres les plus fidèles.

C’est aussi lui qui, dans le sens inverse, amène l’Église là où elle n’est pas ou plus, ce qu’on appelle les marges : les institutions de soins, les prisons, la rue, les migrants et d’autres encore.

Assumant un rôle d’aumônier, il sera aussi cette voix qui dérange, qui met le doigt là où ça fait mal, qui rappelle des valeurs aux institutions. Ou il deviendra le porte-parole de ceux qui n’ont que le droit de se taire.

6. Corvéable ?

Le diacre serait-il la bonne à tout faire de l’Église ? Certainement pas. Il en est un de ses ministres à part entière, mais pas toujours reconnu comme l’égal des pasteurs.

J’ai assumé beaucoup de fonctions différentes, rendu de multiples services, endossé des responsabilités, parce que j’avais des compétences dans des domaines particuliers. Je n’ai pas toujours su dire non. Encore un problème de confiance en soi ou de complexe. J’en ai retiré de la satisfaction, souvent; du succès parfois, de la reconnaissance, pas toujours.

Conclusion

La discussion n’est certainement pas close. Elle peut d’ailleurs se poursuivre par vos commentaires. Je le souhaite. Mais, la question reste ouverte. Tant mieux.

Ces quelques réflexions sur le vif font écho à ce que je pouvais imaginer avant de me lancer dans le diaconat.

Et si la réponse était toute simple finalement ? Être vivant, confiant et conscient de mes qualités et de mes défauts, aimer les autres et vivre tout simplement. Les réponses arriveront quand elles arriveront.

 

[Cet article peut être modifié par vos commentaires].